La levée de boucliers en Occident, au sujet de la situation au Zimbabwe, qui a tout l'air tout l'air d'une "ronde des hyènes autour des cimetières", comme disait, le poète sénégalais David Diop, est analysée différemment par les journaux africains: «Le Potentiel» en RD Congo, "Le Pays du Burkina" et "Notre Voie" de la Côte d'Ivoire. Voici les passages significatifs dans une revue de presse de Radio France International du 10 décembre 2009. Les effets, et non les causes, servent sont souvent utilisés comme éléments d'analyse par beaucoup de nos "observateurs". Et c'est dommage !
La partie de bras de fer se poursuit entre les autorités zimbabwéennes et les pays occidentaux. Invité fermement à quitter le pouvoir par les Etats-Unis et l'Union européenne, Robert Mugabe a répliqué le 9 décembre, par la voix de son porte-parole. Comme le souligne Le Potentiel au Congo démocratique, «Mugabe a accusé les Etats-Unis et le Royaume-Uni de prévoir une invasion du Zimbabwe, rejetant avec véhémence les appels de la communauté internationale pour son départ. Par cette résistance, poursuit le quotidien congolais, Robert Mugabe adresse tacitement un message à la communauté internationale, prouvant qu'il est incontournable pour la recherche d'une paix durable au Zimbabwe.»
Pas la bonne méthode !
«Tous contre Mugabe », titre Le Pays au Burkina Faso. Le Pays qui s'interroge sur l'efficacité d'une telle mobilisation : «le bonheur du peuple zimbabwéen passe-t-il par la démission du président Mugabe ? Pour les Occidentaux et certains dirigeants africains, il n'y a pas de doute, c'est Mugabe qui est la cause de tous les malheurs du pays. (…)
L'Europe et les Etats-Unis ont durci le ton en renforçant les sanctions contre certains dignitaires du régime et en réclamant le départ immédiat de Mugabe. Mais est-ce la meilleure méthode pour régler à la fois la catastrophe sanitaire et la crise structurelle qui mine le pays ? », se demande le quotidien burkinabé.
Réponse : « on peut en douter parce que Robert Mugabe reste soutenu par une grande partie du peuple, il semble garder la confiance de l'armée et surtout il a la bénédiction des anciens combattants de la guerre d'indépendance. »
Et Le Pays d'enfoncer le clou : « Toute cette agitation a quelque chose de dangereux. Elle peut dans le meilleur des cas, amener Mugabe à se replier sur lui-même et, au pire, entraîner un affrontement généralisé, c'est-à-dire une guerre civile. Alors que veut-on finalement pour le Zimbabwe : le bien du pays dans la négociation ou la peau de Mugabe au prix d'un bain de sang ? », s'interroge encore le quotidien burkinabé.
Notre Voie, en Côte d'Ivoire, est beaucoup plus radical. Notre Voie qui qualifie la pression occidentale « d'appel au meurtre ». Pour le quotidien ivoirien, « il y a fort à parier que le départ de Mugabe dans les conditions envisagées par les Occidentaux entraînera le Zimbabwe dans une instabilité qui pourrait faire regretter les années.
Mugabe. Le cas de l'Irak est encore sous nos yeux, poursuit Notre Voie, et devrait incliner l'Occident à plus de prudence dans la démonstration de sa force destructrice. » Et le quotidien ivoirien d'ironiser : « mais malgré tout, si les Occidentaux veulent bien faire la preuve qu'ils aiment les Africains, plus que les dirigeants de ce continent, il leur est loisible d'installer par la force un Etat en Somalie (…). Ou encore de lever une armée pour aller mettre de l'ordre dans l'Est de la RDC. »
Ababacar Fall-Barros est membre du Groupe de Recherche et d’Initiative pour la Libération de l’Afrique
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