Rd Congo : Massacre du 30 décembre 2013 - Mukungubila charge Kabila
Le 30 décembre dernier, les provinces de Kinshasa, de Katanga et de Maniema ont été le théâtre d’un carnage. Ce jour là, au moins 200 partisans de Paul Joseph Mukungubila, pasteur connu pour ses prises de position contre les abus du pouvoir sous Mobutu et surtout Joseph Kabila, ont été massacrés par l’armée congolaise. Quatre mois après, de son exil en Afrique du Sud, l’ancien candidat à la présidentielle de 2016 revient sur ces événements.
Le 30 décembre dernier, les habitants de Kinshasa sont surpris de voir les émissions de la chaine de télévision congolaise Rtnc interrompues et des jeunes gens, mains nues, apparaître à l’écran avant d’inviter les populations à se lever contre la tyrannie de Joseph Kabila. Mais les Kinois étaient loin de se douter que, ce jour là se préparait un carnage contre des citoyens congolais non armés, exprimant leur mécontentement ou manifestent.
En réponse aux revendications de ce que les autorités de Kinshasa nommeront les assaillants, toute la nuit du 30 au 31 décembre, l’armée congolaise, lourdement équipée, se livrera à un massacre. Bombardements, tires à l’arme lourde et surtout actes de barbarie contre des manifestants à mains nues. Le film de la violence sans commune mesure de la soldatesque de Joseph Kabila a fait le tour des réseaux sociaux et, jusqu’à ce jour, l’horreur reste entière !
Le jour qui a suivi, le pouvoir de Kinshasa se lance à une vraie chasse à l’homme. Dans le Katanga, la maison de Mukungubila, dont les jeunes gens massacrés ont revendiqué être des fidèles sur les antennes de la Rntc, est bombardée mais le maître des lieux parvient à s’extirper sous une pluie d’obus. C’est le sauve qui peut : femmes, enfants et autres fidèles du pasteur prennent chacun sa direction, mais beaucoup tomberont.
Dans le Maniema, les partisans de Mukungubila ne sont pas épargnés. L’armée congolaise les canarde à volonté. Entre le 30 et le 1er janvier, pendant qu’à travers le monde l’on fêtait avec faste l’avènement du nouvel an, les adeptes de l’église du prophète des nations, tombaient donc comme des mouches. Un rapport de la Fidh fait état d’au moins 200 morts (1), chiffre que d’autres organisations multiplient par deux voire par trois.
Aux lendemains de ce carnage, les autorités congolaises se lancent dans une campagne de désinformation. Toute la responsabilité de cette affaire est rejetée sur Mukungubila qui, selon Kinshasa, a poussé ses adeptes à perpétrer un coup d’Etat Les soldats qui ont tiré sur des citoyens non armés, de même que ceux qui ont donné les ordres pour ouvrir le feu, ne sont donc pas responsables. Dans la diaspora congolaise, véritable contre-pouvoir au régime de Kabila, le flou se le dispute à l’hésitation. Des positions seront ainsi prises à l’emporte-pièce.
Comme la vérité finit toujours par triompher, Mukungubila, que l’on voulait faire taire à jamais, réussit à gagner l’Afrique du Sud où il sollicite l’asile. Gêné par sa présence au pays de Steve Biko, Kabila, par Interpol interposée, déclenche une procédure d’extradition. Mais grâce au concours de ses avocats et à la mobilisation de la diaspora, Mukungubila déjoue le piège. Et pour répondre aux manœuvres de Kabila, il rompt le silence.
Au cours d’une conférence de presse tenue à Johannesburg la semaine écoulée, il s’est exprimé pour remettre les choses à leur place. Et tout naturellement Kabila en a pris pour son grade. Selon Mukungubila, « pour établir les responsabilités, dans cette affaire, il faut d’abord faire la genèse de la situation’’. Ainsi, pour lui, Kabila - qu’il égratigne en le taxant d’imposteur et étranger à la famille de son oncle Laurent Désiré Kabila - est la cause de tout. « Il m’a fait attaquer parce que j’ai écris deux lettres ouvertes dans lesquelles j’ai dénoncé les accointances entre le pouvoir de Kinshasa et le M 23 et aussi pour son imposture», assène-t-il. Et de poursuivre : «Sous le maréchal Mobutu, j’avais également adressé une lettre ouverte au chef de l’Etat sans que l’on cherche à m’éliminer physiquement.»
Evoluant dans sa logique, Mukungubila, dénote que ses déboires ainsi que le massacre de ses fidèles sont liés. «Mes partisans qui ont été massacrés n’ont fait que réagir à l’attaque de mon domicile qui avait fait l’objet d’un bombardement et je dis que le président Kabila est responsable pour avoir ordonné à ses soldats de faire usage d’armes de combat contre des personnes qui n’étaient pas du tout armées’’, charge-t-il
Mukungubila invite la communauté internationale à diligenter une enquête pour établir la vérité sur le massacre de ses partisans. Un appel que la communauté internationale semble avoir entendue. Car, des sources onusiennes, révèlent que le rapporteur sur les crimes graves et contre l’Humanité a déjà été saisi sur cette affaire.
NOTE
(1) http://bit.ly/1mS4WC8
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** Mohamed Mboyo est journaliste d’origine congolaise
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