Le débat sur la Renaissance africaine marque le début de ce millénaire. Mais il n’est pas nouveau. Dans ce texte, Boubacar Diop remonte à Cheikh Anta Diop qui l’évoquait en 1948, à Nasser qui en a été un des porte-étendard et à Nkrumah qui en a fait un des axes fondamentaux de sa réflexion politique. Diop souligne aussi, à travers cette revue des jalons du panafricanisme, les différents aspects de théorisation qui ont revêtu des dimensions politiques, idéologiques, culturels, scientifiques technologiques, économiques. Mais il note surtout des «angles d’attaque particuliers, suivant que la formulation venait d’un militant hors ou à l’intérieur des structures d’Etat». Et cette question pour finir : comment répondre au défi des articulations ?
La reprise du thème de la renaissance africaine dans les années 1990 est intimement liée au démantèlement de l’apartheid en Afrique du Sud. Ce n’est donc pas surprenant que sa reformulation la plus médiatisée a été attribuée à Thabo Mbeki, ancien président de la nouvelle République sud-africaine. Ce combat pour la Renaissance doit mobiliser des militants politiques, des entrepreneurs et des femmes d’affaires, des mouvements de jeunes et de femmes, des travailleurs, syndicalistes, des leaders religieux, des artistes.
C’est un mouvement qui doit partir du Cap au Caire, de Madagascar au Cap-Vert. Il s’agit d’une rébellion contre les tyrans et les dictateurs qui cherchent à corrompre les sociétés africaines et à voler les richesses du peuple. Il s’agit aussi d’une lutte sans merci contre les criminels de droit commun, qui tuent, violent et volent. Il s’agit, en résumé, d’une lutte contre la pauvreté, l’ignorance et l’arriération des fils et filles d’Afrique. Et le mot de la fin, Thabo Mbecki l’emprunte à Cheikh Anta Diop qui articule les dimensions politiques, scientifique, idéologique panafricaine et humaniste de ce combat prométhéen.
La réussite de ce combat est un des grands défis des nouveaux centenaire (le XXIe) et millénaire (le 3e de notre ère). Sa réussite sera une contribution à l’évènement d’une nouvelle civilisation qui tourne le dos à la barbarie.
Ce résumé de l’argumentaire et de l’appel de Thabo Mbecki montre bien que ce dernier inscrit sa démarche dans une tradition, celle des premiers chantres du panafricanisme. Il a surtout tenté de réactualiser le message, de la recontextualiser et de préciser les cibles et les acteurs.
P. Olisanwuche Esedebe a montré, dans un excellent ouvrage sur le Panafricanisme (Pan Africanisme, the Idea and Movement, 1776-1991, second edition, Howard University Press, 1994), la genèse du panafricanisme en articulation avec la déclaration d’indépendance américaine (1776), la naissance d’une Eglise indépendante négro africaine en Amérique et en Afrique. Il a souligné la place du débat sur le destin des races humaines dans les formulations idéologiques et théoriques ; c’est ainsi qu’il consacre une profonde analyse à l’apport de James Africanus Beale Horton. Ce dernier, né en 1835 en Sierra Leone, après des études en médecine en Angleterre, a servi dans l’armée britannique en Afrique de l’Ouest.
Ses connaissances en Histoire, en Lettres Classiques et en Anthropologie lui permirent de riposter contre les thèses racistes sur l’infériorité du nègre. Mieux la prise en compte des travaux des premiers écrivains chrétiens d’Afrique dans l’Antiquité (Clément d’Alexandrie, Origène, Tertullien, Saint Augustin) n’a pas manqué de lui inspirer la théorie des cycles historiques. Aucune condition n’est permanente ni immuable, il existe une loi naturelle de l’évolution et de la dissolution, les civilisations naissent, se développent et tombent en déclin, s’enfoncent dans la barbarie, puis après un certain temps, renaissent (“There was no reason why the same race that churches and repositories of learning and sciences, that governed ancient Egypt and was the terror of no less a city than ancient Rome should not once more stand on its legs” - J.A.B. Horton, West African Countries and Peoples … A Windication of the Africain Race, 1868, p. 60, cité par P. Olisanwuche Ese debe, opcit p. 22).
Effectivement on peut espérer le relèvement d’un continent qui a eu ses monuments et ses lettres de noblesses ; l’Afrique a produit des oeuvres de grande spiritualité et de haute technicité, elle a abrité des Etats qui ont organisé la vie des populations dans l’antique Egypte des Etats qui ont fait trembler le monde (au Ier siècle avant notre ère, la reine de Méroé a obligé César Auguste à signer un traité de paix dans l’Ile de Samos). Il n’est donc pas condamné ce continent qui a aussi abrité des empires comme celui d’Axoum ; cet Etat battait son propre monnaie, avait son propre alphabet, rivalisait avec les Perses et les Romano Byzantins au VIe siècle, juste avant l’hégémonie islamique au Proche Orient.
Mais ces Africains du XXIe siècle sont-ils les mêmes que ceux de l’Antiquité ou ceux du “Moyen Age” ? Ne seraient-ils pas réellement les produits des “Temps obscurs” de l’histoire africaine ? En 1948, Cheikh Anta Diop avait formulé une question géniale : “Quand pourra-t-on parler d’une renaissance africaine” ? (Article paru dans la revue le Musée vivant, n° spécial 36-37, novembre 1948, Paris, pp. 97-65, republié dans Alerte sous les Tropiques, articles de 1946-1960 ; Culture et développement en Afrique noire, Présence Africaine, 1990, pp. 33-44). Pour le savant sénégalais, la réalité (culturelle) africaine des années 40 est double : il y a d’une part “la tradition qui est restée intacte et qui continue de vivoter à l’abri de toute influence moderne, d’autre part une tradition altérée par une contamination européenne”. Dans les deux cas, on ne peut parler de renaissance. Pour l’auteur, la condition préalable d’une vraie renaissance africaine est le développement des langues africaines.
L’auteur qui, à l’époque, ne semblait pas être informé de la prodigieuse inventivité africaine en matière d’écriture , est conscient des difficultés de l’entreprise : multiplicité apparente des langues, acclimatations des termes scientifiques et techniques. Diop est d’avis que l’action qu’il préconise concerne à peine quatre langues importantes, le reste n’étant que des variantes parlées par un petit groupe. Pour lever le défi scientifique, les Africains doivent s’essayer dans les principales langues de leur pays, avec toutes les facilités inventives et leur esprit d’initiative. Leur tâche est facilitée par l’apparition de “nouveaux moyens de diffusion de la pensée : imprimerie, radio, cinéma.
Grâce à tous ces nouveaux moyens de diffusion qui sont propres au monde moderne, il y a plus de possibilité de s’instruire, par conséquent plus de possibilités d’action efficace” (op. article cité, Présence Africaine, p. 37). Et Diop de développer les grandes lignes de la rénovation culturelle qui passe par une véritable révolution de la conscience psychologique. La création littéraire devrait concerner tous les genres : satires, épitres, poèmes historiques, narrations etc. L’expression plastique doit bannir l’imitation des formes occidentales ; la peinture, la sculpture doivent être revigorées et refuser le passéisme. L’architecture africaine millénaire est susceptible d’une adaptation nouvelle. La nouvelle musique africaine “doit exprimer le chant de la forêt, la puissance des ténèbres et celle de la nature, la noblesse de la souffrance, avec toute la dignité humaine” (article cité p. 43). “Cette musique sans cesser d’avoir quelque chose de commun avec le jazz dans le domaine de la sensibilité, aura je ne sais quoi de plus fier de plus majestueux, de plus complet de plus occulte” (ibidem).
Le combat culturel est indissociable du combat politique et scientifique. “C’est pour cela que, au delà de la culture proprement dite, l’élite africaine a le devoir impérieux, inéluctable, de doter farouchement tout le continent, sans distinction de frontières politiques, d’une technique industrielle, seuls garantie de la sécurité de vivre dans un monde atomique”. (article cité p. 42) Cheikh Anta de conclure son article en exprimant sa foi au rationalisme laïque appelé à remplacer, à l’avenir, tous les faux contacts avec la nature.
Kwamé Nkrumah a lui aussi développé le thème de la Renaissance Africaine. Dans son ouvrage “Le consciencisme”, qui illustre sa solide formation philosophique, il revient largement sur la seconde Renaissance européenne, celle du XVIe siècle ; la première étant celle qui, dès l’Antiquité, avait été ouverte par Aristote. Procédant à une fine analyse. Il montre que même si ce second mouvement, dans son expression philosophique libéra la pensée de certaines entraves, surtout religieuses, il fit bon ménage avec le capitalisme (le consciencisme, Présence Africaine, 1976, pp. 66 sq).
Il expose les pulsions divergentes du mouvement en Europe, l’évolution de l’attitude de l’Eglise, les tensions entre libertins et jésuites en France par exemple, pour montrer comment cet héritage a été vécu au XXe siècle. La leçon qu’il en tire, c’est l’intérêt qu’il y a de “replacer une philosophie dans le contexte de l’histoire intellectuelle à laquelle elle appartient et du milieu où elle est née”. (opcit p. 71) Tout cela l’amène à insister sur l’importance de l’histoire dans le projet de Renaissance africaine.
Notre renaissance africaine insiste beaucoup sur la façon de présenter l’histoire. Il faut écrire notre histoire comme l’histoire de notre société, non comme l’histoire d’aventuriers européens. La société africaine doit être considérée comme jouissant de sa propre intégrité. Son histoire doit être le reflet d’elle-même et les contacts avec les Européens ne doivent y figurer que sous l’angle de l’expérience des Africains, même s’ils ont été une expérience plus importante que toutes les autres. Autrement dit, les contacts avec les Européens doivent être narrés et jugés au point de vue des principes qui animent la société africaine, au point de vue de l’harmonie et du progrès de cette société (opcit. p. 80).
La Renaissance à laquelle pense Nkrumah passe par la consolidation de l’indépendance, l’instauration d’un socialisme qui cherche à se rattacher au passé égalitaire et humaniste du peuple, qui cherche comment utiliser même les résultats du colonialisme adaptés dans l’intérêt du peuple (par exemple les méthodes nouvelles de production industrielle et d’organisation économique) ; il cherche à freiner et prévenir les anomalies et inégalités créées par l’habitude capitaliste du colonialisme, il réforme la psychologie du peuple en la purgeant de la mentalité coloniale. “Enfin, il défend résolument l’indépendance et la sécurité du peuple. Il reconnaît le caractère créateur de la lutte et même la nécessité, pour toute transformation de l’intervention de forces. Il comporte aussi le matérialisme et le traduit en termes d’égalité sociale” (opcit p. 129).
Ce texte intègre le fruit de l’expérience d’un militant et d’un homme d’Etat qui a été victime d’un coup d’Etat (la note d’auteur de la 2e édition, celle 1976 est explicite là-dessus). Nkrumah est conscient des divisions sociales culturelles et idéologiques en Afrique. “La société africaine, dit-il, comprend une fraction fidèle à notre genre de vie traditionnelle, une fraction représentant la présence en Afrique de la tradition musulmane, enfin une fraction trahissant l’infiltration de la tradition chrétienne et de la culture de l’Europe occidentale dont les principaux véhicules sont le colonialisme et le néocolonialisme. Ces trois fractions sont animées par des idéologies rivales” (opcit p. 86). Le consciencisme qu’il préconise est une idéologie qui contient à la fois l’expérience africaine de la présence musulmane et euro-chrétienne et celle de la société traditionnelle, pour un développement harmonieux de cette société (opcit. p. 89).
La question des relations entre l’Afrique au Sud du Sahara et l’Afrique septentrionale ne pouvaient donc être éludées ni par Cheikh Anta ni par Nkrumah, encore moins par Gamal Abdel Nasser. En écrivant son article “Vers une idéologie politique africaine”, février 1952, C. Anta avait lancé un appel au peuple égyptien pour une révolution sociale qui démocratiserait son régime politique (Présence Africaine, 1990, p. 61). Nasser et son organisation secrète des “Officiers Libres” prit le pouvoir le 23 juillet 1952. L’Egypte s’engage à partir de ce moment, et surtout après l’agression occidentale de 1956, dans une politique progressive en Afrique et dans le monde arabe.
Déjà en 1955 fut mis en place le bureau de “liaison africaine”, avec un service spécial logé à la présidence de la République, donc sous le contrôle direct du raïs, qui coordonne l’intervention en direction du reste du continent. En 1959 des bureaux furent ouverts pour les représentants des mouvements de libération. A partir de 1959, les mouvements suivants furent actifs sur le territoire égyptien : les combattants de la liberté du Rwanda et du Burundi (1959 à 1961), le Partit National Démocratique de Rhodésie du Sud à partir de 1960, le Congrès de la Ligue Africaine (ALC) et l’ANC d’Afrique du Sud, le MPLA et l’UNITA d’Angola (de 1961 à 1972), le PAIGC de Guinée-Bissau (de 1961 à 1974), le Frelimo du Mozambique de (1963 à 1975), la ZANU et la ZAPO du Zimbabwé (à partir de 1964 et 1965).
Des programmes de radio furent diffusés en arabe et en swahili à partir du Caire. La Voie de l’Afrique (Sawt Ifrikiya) soutenait le combat pour la libération. Une revue trimestrielle, « Nahdat Ifrikiya » (la Renaissance africaine) relayait ce programme par l’écrit en arabe, avec des extraits en anglais et en français (cf. Saliou Ndiaye, Nasser entre le panafricanisme et le panarabisme 1958-1970, mémoire de maîtrise, département d’arabe, FLSH, Université Cheikh Anta Diop, 1997-1998, p. 20 sq).
Mais “l’ambition réelle de Nasser d’œuvrer pour une unité intégrale afro arabe a été fortement ébranlée par l’incidence d’un contexte politique particulier qui a prévalu entre 1961 et 1963. De la rupture de la RAU, à la création de l’OUA, Nasser a été victime d’une contestation sévère aussi bien du panarabisme qu’au sein du panafricanisme. Par conséquent, sa politique africaine a été modifiée et centrée sur la recherche d’une unité d’action à travers un bloc à la fois anti impérialiste, anti raciste et anti sioniste” (Saliou Ndiaye, opcit. P. 80).
Cette revue de quelques-uns des jalons du panafricanisme et de l’appel à la Renaissance permet de constater qu’il y a eu dans l’effort de théorisation non seulement des aspects politiques, idéologiques, culturels, scientifiques technologiques, économiques, mais aussi des angles d’attaque particuliers, suivant que la formulation venait d’un militant hors (C. Anta Diop) ou à l’intérieur des structures d’Etat ; les différences des positions et de focalisations (Nkrumah, Nasser) sont à tenir en compte pour saisir les contres points dans le débat sur la Renaissance.
C’est dans un contexte de reformulation, de réaménagement de la thématique sur la Renaissance Africaine qu’intervient le nouveau souffle donné à l’OUA lors des sommets d’Alger et de Syrte en 1999. L’élément de rupture avait été annoncé à l’occasion du 29 anniversaire de la révolution libyenne, en septembre 1998. Le discours prononcé par le président Moamar Khadafi, à cette occasion, est riche d’enseignements. On y ressent un plaidoyer pour la race noire, du style de l’écrivain Jahiz qui, au IXe siècle, au cœur du monde arabe, avait osé évoquer la supériorité des Noirs.
Pour Khadafi, Allah a béni les noirs. Il s’est étendu sur les richesses prodigieuses du continent, dans le même style que Cheikh Anta Diop dans les « Fondements économiques et culturels d’un Etat fédéral d’Afrique noire », (Paris, Présence Africaine, 1960, 1974). Il remercie les peuples noirs d’Afrique qui ont osé briser l’isolement créé autour de la Libye. Il demande au peuple libyen, aux peuples d’Afrique du Nord, de l’Egypte jusqu’en Mauritanie de se convaincre qu’ils sont africains, qu’ils ne peuvent faire fi de leur pigmentation noire ou brune (peu importe le terme utilisé). Il invite ceux qui ne se reconnaissent pas dans l’africanité à être conséquents et à quitter le continent, à aller chez leurs maîtres en Europe ou en Israël. Il s’en prend à ceux qui se plaisent à mendier les subsides de l’Europe. Il prône le dépassement des divisions linguistiques, ethniques, tribales. Sa conviction est faite que l’Afrique est potentiellement plus riche que l’Europe et l’Amérique et que le jour où elle se réveillera, ceux qui profitent de la faiblesse des Africains (l’Europe et l’Amérique du Nord) risquent de s’enfoncer dans les abysses. Il rend hommage à Nasser, Nyerere, Mandela. Il s’était promis dans ce discours de convoquer des assises spéciales pour revisiter la charte de l’OUA et donner un nouvel clan au panafricanisme ; ce qui a été fait.
Le leader libyen, qui déjà avait œuvré et continue d’œuvrer au financement de la traduction de l’histoire générale de l’Afrique par l’Unesco dans les langues africaines, s’est encore signalé par un effort considérable d’octroi de bourses de formation aux étudiants africains. La voie de la Renaissance semble donc balisée pour lui.
Pour d’autres, les jeunes Africains ont déserté ces grands idéaux qui ont pour noms : Panafricanisme, marxisme, négritude. “Les seuls groupements ou associations qui attirent les jeunes sont des clubs culturels où ils peuvent apprendre danses et musiques à la mode en copiant les clips des grandes stars diffusés par les chaînes internationales CNN, AFI, Canal Horizon…” (Francis Awoudo, Syfia, repris par le Cafard Libéré du 11 août 1999, sous le titre Génération concrète). Comment donc gagner le combat pour la Renaissance et le Développement ?
Les défis des articulations
Dans le cadre du NEPAD (Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique), la réussite du Projet de Renaissance Africaine dépend de l’avènement d’une économie forte et compétitive (cf. NEPAD, octobre 2001, p. 13, L’appel aux peuples africains, point 50). Il est toutefois reconnu que la culture fait partie intégrante des efforts du développement du continent. L’éducation est aussi prise en compte. Elle est considérée comme condition pour le développement durable ; elle permet le développement des ressources humaines et le souhait est exprimé pour le développement des expertises et la lutte contre la fuite des cerveaux.
Le rapport 2006 du NEPAD revient sur le renforcement des capacités en recherche, éducation, éducation à distance et formation des enseignants, éducation dans les zones engagées dans la reconstruction après conflits, formation en mathématiques, sciences et technologiques. Ces projets sont jugés insuffisants pour relever les grands défis qui sont consignés dans les OMD. Un autre rapport publié en 2008 montre que le continent dans son ensemble accuse du retard sur chacun des objectifs à atteindre (cf. rapport de la plateforme africaine pour l’éducation des adultes, 2008, p. 7 à 9).
Ainsi, dans le plan d’action consolidé de l’Union Africaine sur la science et la technologie en Afrique, parmi les programmes vedettes de recherche et de développement, la troisième concerne la promotion des connaissances indigènes.
Les objectifs de ce programme sont ainsi déclinés :
- renforcer et élargir la compréhension par le public de la nature et de la contribution du savoir et savoir faire indigènes ;
- promouvoir les liens entre les institutions formelles de recherche–développement et les détenteurs de savoir et savoir faire ;
- en accroître le partage et l’application à l’intérieur de l’Afrique afin de résoudre les problèmes spécifiques ;
- améliorer la capacité du continent de les protéger contre la piraterie et le détournement qui en résulte (cf. doc. cité, août 2005, p. 15).
Ce programme est censé être mis en œuvre à travers deux projets :
- le développement d’une base de données africaines sur le savoir et le savoir faire endogène ;
- la promotion de l’intégration du savoir et des pratiques indigènes dans les programmes éducatifs.
Il est recommandé d’organiser des ateliers pour la matérialisation de ces recommandations, ateliers qui tireront profit des bonnes pratiques au plan international. En vue de la seconde décennie de l’Education en Afrique (2006-2015), il a été élaboré un plan d’action pour la première période biennale 2007-2008. Ce plan a retenu dans les domaines prioritaires la production du savoir et l’organisation du système du savoir. Il est donc important, dans la perspective des grands rendez-vous sur l’Education que l’Union Africaine, que le secteur privé africain et la société civile africaine s’entendent pour assurer la réalité de ces articulations tant souhaitées.
Pour ce faire, il faut faire l’état des lieux, recenser ce qui a été déjà fait par les uns et les autres, se réapproprier ce que des chercheurs ou des instituts non africains ont eu à faire sur le sujet. Accélérer les échanges de bonnes pratiques et les généraliser. Ainsi, l’éducation africaine en tirera grand profit, les bénéfices seront ceux de l’Education Pour Tous, l’Education des Adultes, l’éducation éternelle et pan humaine.
Conclusion
Il faut toujours situer les systèmes éducatifs en tant que sous systèmes, il faut assurer une pertinence des contenus et des programmes, les formateurs doivent être enracinés et ouverts. Le système éducatif doit répondre aux besoins des sociétés africaines dans la sphère du vivre, du survivre, et des raisons de vivre.
Ce système doit apprendre à produire, doit redonner la place qu’il faut à l’éducation physique. Elle doit inciter à la créativité, à l’inventivité. Elle doit pousser jeunes et adultes à créer, à trouver, à chercher pour trouver. “Le lieu de solution de quelques uns de nos problèmes essentiels ne réside que dans une certaine intégration de l’espace africain. En dehors de cette intégration, on parle pour ne rien dire. Il y’a un espace minimal au dessous duquel on ne peut pas réaliser certains projets majeurs, dans le domaine de la recherche en particulier, mais aussi dans le domaine d’une éducation digne de ce nom, pertinente par rapport à notre époque.
Le problème des centres d’excellence est encore insoluble parce que chaque fois on ramène le problème au niveau national (Ki-Zerbo, Repères pour l’Afrique, opcit. p. 103-104). Pour assurer donc la libération, la renaissance et le développement africain, il nous faut :
- tenir compte de notre trajectoire historique et bien cerner les défis contemporains et suivre les recommandations des experts africains engagés dans les processus de libération, de renaissance et de développement africains ;
- articuler les combats pour l’éducation aux combats pour la paix, la citoyenneté républicaine et responsable, pour l’unité des peuples africains et la solidarité humaine ;
- veiller à l’accès et à la qualité ;
- veiller à la dimension genre ;
- articuler éducation à la protection de l’environnement, à la transformation sociale positive, la lutte contre les inégalités, les injustices ;
- articuler l’éducation aux politiques culturelles, favorisant le multilinguisme et le multimédia.
* Boubacar Diop est professeur à la Faculté des Lettre et Sciences humaines de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et président de la PAALAE
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