Dans la crise politique que connaît Madagascar, les acteurs politiques sont entendus sur un processus, des initiatives, des engagements et un code de conduite. Elle interpelle aussi la Communauté internationale.
Les Acteurs Politiques Malgaches parties prenantes à cette Feuille de Route se sont convenus de prendre les engagements ci-après;
1. Continuation du dialogue Malgacho – Malgache entre les Acteurs Politiques Malgaches pour la formation d’un Gouvernement de Transition d’Union Nationale et l’élargissement de la composition des institutions parlementaires de transition et de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), dans le cadre d’un processus de transition neutre, inclusif et consensuel vers des élections libres, crédibles et transparentes à Madagascar;
2. Confirmation d’Andry Rajoelina comme Président de la Transition. En cette qualité, il exerce les fonctions de chef de l’Etat;
3. Formation d’un Gouvernement de Transition d’Union Nationale consensuel et inclusif, dirigé par un Premier ministre de consensus. Le Premier ministre sera nommé par le président de la Transition sur une liste de personnalités proposées par les Acteurs Politiques Malgaches parties prenantes à cette Feuille de Route. Il est entendu que le Premier ministre de consensus ne peut être originaire de la même province que le président de la transition, ni être issu des Acteurs Politiques Malgaches s’identifiant ou étant identifiés comme faisant partie de la majorité présidentielle;
4. Les Acteurs Politiques Malgaches parties prenantes à cette Feuille de Route sont invitées à présenter une liste de personnalités parmi lesquelles le Président de la Transition, sur proposition du Premier Ministre de consensus, nomme les Membres du Gouvernement de Transition. En nommant l’exécutif, le Président de la Transition et le Premier Ministre de consensus s’engagent à opérer une allocation juste et équitable des portefeuilles, en respectant la provenance politique, la représentation de genre et l’équilibre régional. En cas de révocation d’un membre du gouvernement, il sera remplacé par un autre membre de son groupe de provenance politique selon les mêmes règles de procédure de nomination;
5. Pour l’élargissement de la composition des autres institutions de la transition, comme le Congrès de Transition (CT), le Conseil Supérieur de Transition (CST) et la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), les Acteurs Politiques Malgaches parties prenantes à cette Feuille de Route sont invitées à présenter une liste de personnalités parmi lesquelles le Président de la Transition nomme les membres de ces institutions. En nommant les membres de ces institutions, le Président de la Transition s’engage à opérer une allocation juste et équitable des postes, en respectant la provenance politique, la représentation de genre, l’équilibre régional et aussi l’équilibre de partage entre les Acteurs Politiques Malgaches signataires de la présente Feuille de Route, pour une bonne gestion de la transition;
6. Le Gouvernement de Transition sera chargé de l’administration des affaires courantes du pays et de mettre en place les conditions nécessaires pour des élections crédibles, justes et transparentes, en coopération avec la communauté internationale. Il s’abstiendra de prendre de nouveaux engagements à long-terme, ceux-ci ne relevant que de la compétence du futur Gouvernement à l’issue des élections;
7. Le Parlement de la Transition sera chargé du contrôle du travail du Gouvernement de Transition. Le Parlement de la Transition sera aussi chargé de la ratification des ordonnances adoptées pendant la transition, en particulier celles qui concernent le processus électoral;
8. Elaboration et mise en œuvre, avec l’appui des experts des Nations Unies, d’un cadre électoral crédible, neutre, transparent et indépendant, fondé sur le respect des droits fondamentaux et des normes internationales, notamment par:
a. L’élargissement de la composition de la CENI pour assurer une représentation équilibrée de tous les Acteurs Politiques Malgaches parties prenantes à cette Feuille de Route. La CENI devra être chargée d’organiser toutes les élections, notamment les élections législatives, présidentielles et municipales. Disposant des pleins pouvoirs dans la gestion de l’ensemble du processus électoral, la CENI aura la responsabilité d’assurer que les élections se déroulent de manière libre, juste et transparente. Lesdits pleins pouvoirs de la CENI s’arrêtent à la publication des résultats provisoires des élections;
b. la révision du Code électoral;
c. une nouvelle loi sur les Partis Politiques;
d. promouvoir l’adoption et le respect d’un Code d’Éthique et de Bonne Conduite Électorale des Acteurs Politiques Malgaches;
e. une loi sur le Statut de l’Opposition;
f. une nouvelle loi sur le Statut des Anciens Chefs d’Etat;
g. l’utilisation du système du bulletin unique;
h. éducation électorale;
i. la révision systématique des listes électorales;
j. la révision du calendrier électoral. Le calendrier électoral sera défini sur la base des conclusions d’une mission d’évaluation des besoins électorales organisée par les Nations Unies. Les Acteurs Politiques Malgaches parties prenantes à cette Feuille de Route s’accordent sur le principe de l’organisation au moins des élections législatives et présidentielles pendant la saison sèche, à savoir le période du 1er Mai au 30 Novembre 2011;
k. l’éclatement au niveau des 119 districts des données et des matériels des centres informatiques régionaux.
9. La Société Civile Malgache est invitée à faire l’observation électorale des élections législatives et présidentielles et à interpeller les Acteurs Politiques Malgaches qui transgressent le Code d’Éthique et de Bonne Conduite Électorale. La communauté internationale sera appelée à soutenir le renforcement des capacités de la société civile;
10. Le Président de la Transition, le Premier Ministre de consensus et les Membres du Gouvernement sont tenus de démissionner de leurs fonctions 60 jours avant la date du scrutin, s’ils décident de se porter candidats aux élections législatives et présidentielles. Toutefois, afin de pallier à toute éventualité de vide juridique, une loi sera adoptée par le Parlement de la Transition pour définir les conditions de mise en œuvre y afférente;
11. Le Président, le Gouvernement, les Chefs d’institutions et l’ensemble de l’administration de la transition doivent rester neutres dans la période de transition, en particulier dans le processus électoral;
12. Le Président, le Gouvernement, l’ensemble de l’administration de la transition et toutes les institutions de transition doivent s’engager chacun en ce qui le concerne à adopter des mesures de sécurité et de confiance pour créer une atmosphère sereine et apaisée, en mettant un terme aux poursuites judiciaires en cours engagées à l’encontre des membres de l’opposition qui pourraient apparaître comme fondées sur des motifs politiques, et en assurant le respect de l’état de droit et du principe de l’égalité de traitement. Ces mesures de confiance ne peuvent pas concerner les poursuites judiciaires engagées dans le cadre des crimes contre l’humanité, crimes de guerre, crimes de génocide et violations graves des droits de l’homme et des libertés fondamentales;
13. Le Président, le Gouvernement de Transition, l’ensemble de l’administration de la transition ainsi que toutes les institutions de la transition doivent s’engager à protéger et promouvoir les Droits de l’Homme à Madagascar, et à respecter les libertés fondamentales, notamment la liberté d’expression, d’opinion, d’association et de manifestation, ainsi que la liberté de presse. L’exercice de ces droits doit être fait en respectant les lois du pays;
14. Octroi d’une amnistie large pour tous les événements politiques intervenus entre 2002 et 2009. Sont exclus de l’amnistie les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les crimes de génocide et d’autres violations graves des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que les détournements de fonds publics. La loi d’amnistie sera ratifiée par le Parlement de Transition et aucune élection ne devrait avoir lieu avant cette ratification;
15. Marc Ravalomanana ne devrait pas rentrer à Madagascar jusqu’à l’instauration d’un climat politique et de sécurité favorable dont l’appréciation relèvera de la compétence souveraine et exclusive du futur Gouvernement à l’issue des élections. Le Président, le Gouvernement et l’ensemble de l’administration de la transition prennent l’engagement de veiller à la protection de la famille et des biens de Marc Ravalomanana. En échange, il doit s'engager à s'abstenir de toute action déstabilisatrice au cours de la transition;
16. Les Acteurs Politiques Malgaches parties prenantes à cette Feuille de Route s’engagent à adopter sans délai un Code d’Éthique et de Bonne Conduite Politique pour régir les activités politiques à Madagascar pendant la période de transition. ils s’engagent également à respecter ce code;
17. Tous les Acteurs Politiques Malgaches parties prenantes à cette Feuille de Route sont invitées à participer de bonne foi au processus de transition. Ils s’engagent également à instaurer un climat de paix et de sécurité pour tous les Malgaches, à éviter l’obstruction du processus de transition et à maintenir une posture constructive et patriotique pour faire avancer la transition;
18. Aucun Acteur Politique Malgache partie prenante à cette Feuille de Route ne peut et ne doit s’arroger un droit de veto à cette Feuille de Route pour la période de transition;
19. Tous les Acteurs Politiques Malgaches parties prenantes à cette Feuille de Route doivent récuser le recours à la violence ou la menace à un tel recours pendant la période de transition. Ils doivent également s’abstenir d’inciter à la haine;
20. Un processus de réconciliation nationale, dirigé par une institution nationale dénommée le Comité du Fampihavanana Malagasy (Comité de la Réconciliation Malagasy) et facilité par la communauté internationale, devra être entamé afin de soigner et commencer à guérir les blessures individuelles et collectives du passé et établir de saines fondations pour l’avenir de Madagascar. La composition, le fonctionnement, la gestion et la compétence dudit Comité seront établis par une loi adoptée par le Parlement de Transition;
21. Les membres de la Société Civile Malgache, dont les Raiamandreny Mijoro, le FFKM, la CNOSC et le FINONA sont chargés du suivi et du contrôle nationaux de l’application de cette feuille de route, jusqu'à la fin de la période de transition. Dans l’exercice de leurs fonctions ils sont invités à préserver leur apolitisme et leur unité;
22. Un Bureau de la Médiation de la SADC sera installé à Madagascar pour y soutenir le dialogue Malgacho – Malgache et le processus de transition. La mission du Bureau de la Médiation s’achèvera le jour de l’investiture du nouveau Président de la République, qui marquera la fin de la transition;
23. Les présents engagements annulent et remplacent tous les engagements pris et ou signés antérieurement concernant la transition à Madagascar.
24. Aucune procédure d’empêchement ou de destitution du Président de la Transition, ni aucune motion de censure à l’endroit du Gouvernement de Transition ni aucune mesure de dissolution du Parlement de Transition ne peuvent être exercée, pendant la transition.
25. Tout conflit dans l’interprétation des dispositions de la présente Feuille de Route sera soumis à l’arbitrage de la Médiation de la SADC.
26. Engagements de la Communauté International
Après la mise en place effective d’un Gouvernement de Transition d’Union Nationale, du Parlement de Transition et d’une Commission Electorale Nationale Indépendante neutre, inclusive et consensuelle, ainsi que la conclusion d’un accord sur une Feuille de Route pour la période de transition, la communauté internationale prend les engagements suivants:
27. L’établissement d’un Bureau de la Médiation de la SADC à Madagascar pour y soutenir le dialogue Malgacho – Malgache et le processus de transition. À cet égard, les Nations Unies sont appelées à apporter une assistance technique, administrative et financière à la Médiation de la SADC;
28. Reconnaissance du Président et du Gouvernement de Transition de Madagascar, après la mise en place des institutions de transition inclusives et consensuelles;
29. La communauté internationale s’engage à apporter son soutien multiforme aux institutions de transition consensuelles et inclusives, notamment le Gouvernement de Transition, le Congrès de Transition, le Conseil Supérieur de Transition et la Commission Electorale Nationale Indépendante et le Comité de Fampihavanana Malagasy;
30. La SADC, l’Union africaine, les Nations Unies, l’OIF, la COI et plus largement la communauté internationale s’engagent à apporter leur soutien politique, technique, matériel, logistique et financier à ce dialogue et à ce processus de transition, pour assurer une transition sans heurts débouchant sur des élections crédibles, libres, justes et transparentes;
31. Octroi d’aide financière, technique, matérielle et logistique au processus électoral;
32. Sous l’égide de l’équipe de médiation de la SADC, appuyé par les Nations Unies, la communauté internationale sera chargée du suivi et contrôle internationaux de la mise en œuvre de cette feuille de route, en collaboration avec les acteurs nationaux et internationaux pertinents;
33. La communauté internationale s’engage à envoyer des observateurs internationaux pour les élections législatives et présidentielles;
34. Suspension et levée progressive et conditionnée des sanctions imposées à Madagascar en fonction de la mise en œuvre des étapes fixées dans cette feuille de route;
35. Les partenaires examineront la possibilité de reprendre leur aide et coopération au développement, humanitaire, financier et économique;
36. Le Médiateur devrait continuer à suivre de près la situation, apporter en tant que de besoin son soutien et sa facilitation aux parties malgaches, et faire régulièrement rapport à la SADC, l’UA et la communauté internationale sur l’évolution de la situation à Madagascar.
(16 Février 2011)
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