Nouvelle constitution tunisiennes et vieilles tentations

href="http://www.arabiangazette.com/tunisia-president-fires-central-bank-gove…">cc AG[/urlDe fait, la nouvelle Constitution tunisienne recèle des réponses à des questions essentielles qui travaillent la société. Le texte prévoit également des instances de régulation indépendantes pour veiller à la neutralité des gouvernants, la consécration des principes démocratique et à la stricte observance des dispositions constitutionnelles. Mais il faut en souligner quelques insuffisances.

Après un retard de 15 mois par rapport au délai initial, après des tiraillements, parfois extrêmement forts, qui ont opposé les islamistes aux courants dits libéraux ainsi qu’aux composantes de la société civile et qui se sont focalisées sur des questions diverses comme le statut de la femme, le rôle de la Chariaa et du Livre sacré dans la vie publique, l’Assemblé nationale constituante (Anc) tunisienne a fini par adopter la nouvelle Constitution. Voté par une majorité écrasante, le texte a été accueilli, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, comme un texte de rupture avec le despotisme et l’autocratie. Le pays qui a inauguré le printemps aura ainsi ouvert le premier la page de la construction démocratique.

De fait, la nouvelle Constitution recèle des réponses à des questions essentielles qui travaillent la société : des garanties pour les libertés, les droits fondamentaux, le caractère civil de l’Etat, les libertés de croyance et de conscience, l’indépendance de la justice, la neutralité des forces armées et de sécurité, le maintien des droits des femmes et le souci d’une égalité véritable entre hommes et femmes par l’institution de la parité dans les «conseils élus». Le texte prévoit également des instances de régulation indépendantes pour veiller à la neutralité des gouvernants, la consécration des principes démocratique et à la stricte observance des dispositions constitutionnelles.

Tout en exprimant la satisfaction que nous inspirent les principes et fondements de la Constitution, nous tenons à souligner quelques insuffisances :

- La nouvelle Constitution ne contient pas de garantie claire des droits des minorités « ethniques » et religieuses ;

- Elle ne prévoit pas l’abolition de la peine de mort et le respect du droit à la vie, et ce malgré tous les efforts déployés dans ce sens par les différents acteurs de la société civile ;

- Les concertations de dernière minute à l’Anc pour des formulations consensuelles n’ont pas empêché la persistance d’articles ouverts à toutes « les exégèses ». Outre l’Article premier et l’ambiguïté qu’il entretient sur le statut de l’islam (religion de l’Etat ou religion de la Tunisie), on peut citer l’article 6 qui stipule la protection du « sacré » sans en préciser le contenu ;

- L’existence de dispositions garantissant la liberté d’édition, de croyance ou l’indépendance de la justice n’a pas empêché le chef du gouvernement sortant de ressusciter le dépôt légal préalable, quelques jours seulement avant sa démission. De même, Jabeur Mejri, condamné à sept ans de prison ferme pour atteinte à l’islam, n’a pas été gracié malgré les appels lancés par les Ong nationales et internationales. Sans parler de l’indépendance du parquet qui demeure l’objet d’un bras de fer entre le pouvoir exécutif et les structures professionnelles de la magistrature ;

- Preuves s’il en est que la nouvelle Constitution, cette avancée indéniable, demeurera lettre morte tant qu’elle n’est pas suivie de dispositifs concrets pour sa mise en oeuvre. Le destin « mouvementé » de la Constitution de 1959 dont maints articles ont été vidés de leur sens, est une leçon de choses.

Le fin mot de l’histoire est le suivant : le rôle de la société civile, dont on a vu la détermination à scruter les brouillons successifs du projet constitutionnel et à agir pour aboutir à la dernière mouture, sera déterminant. Seule une société civile aussi vigilante permettra de déjouer les retournements toujours possibles contre les principes démocratiques.

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** Ce texte est l’édito de Lettre du Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie – Edition de février 2014

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