L’impérialisme français s’enfonce davantage au Mali

En dépit des succès affirmés dans la lutte contre les milices islamistes, le conflit au Mali empire. Dans ce contexte, les signes de propagande impérialiste concernant le déroulement des opérations sont indicatifs d’une propagande dont le but est d’obtenir le soutien du public pour des invasions militaires et des occupations. Des scénarios similaires à ce qu’on a pu voir en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie.

Des responsables du ministère de la défense français ont dit qu’ils prévoyaient de se retirer du Mali d’ici avril. Depuis le 11 janvier, lorsque les militaires français ont commencé de bombarder et de lancer une offensive terrestre dans ce pays riche en ressources, le gouvernement à Paris a déclaré que ses opérations étaient limitées et qu’elles n’avaient lieu qu’en attendant l’intervention de la force régionale provenant des pays de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

Bien que plusieurs milliers de soldats provenant de différents Etats africains, y compris le Tchad et le Nigeria, ainsi que les soldats maliens ont combattu aux côtés des français, l’ancienne puissance coloniale a aussi appelé les Nations Unies à venir s’engager dans des opérations dont le but véritable est de s’assurer le contrôle des ressources du Mali pour le bénéfice des Etats occidentaux industrialisés. Auparavant, le secrétaire général des Nations Unies avait déclaré publiquement qu’une intervention directe de cet organisme international mettrait en péril son personnel qui accomplit des tâches humanitaires à l’intérieur du pays et dans toute la région.

Le 10 février, dans la ville de Gao au nord du pays, des combattants armés ont ouvert le feu contre des militaires maliens dans un quartier populaire de la ville. Les hélicoptères français sont bientôt entrés en action, tirant dans la zone du centre ville, pour une bataille qui a duré jusque dans la soirée. Selon un rapport de l’Associated Press, "l’attaque à Gao montre que les combattants islamiques, dont beaucoup sont bien équipés et ont de l’expérience du combat, sont déterminés et audacieux et cela laisse présager une longue campagne pour la France et d’autres nations impliquées dans la tentative de restauration du contrôle du gouvernement dans cette immense nation saharienne en Afrique du nord ouest. Les islamistes radicaux ont combattu l’armée malienne tout l’après-midi et ont été vus déambulant dans les rues et sur les toits au centre de Gao qui compte une population de 90 000 habitants" (10 février)

On estime que les combattants impliqués dans cette confrontation proviennent du Mouvement pour l’unité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). Après qu’il a été rapporté que les Français sont entrés dans Gao le 26 janvier, ce mouvement a tiré sur les unités militaires depuis l’extérieur de la ville. Selon le général français Bernard Barera ses combattants utilisent des petits bateaux pour traverser le fleuve Niger à Gao. Et le 9 février une bombe a explosé à proximité d’un checkpoint à l’entrée de la ville

Abdoul Abdoulaye Sidibé, un membre du parlement malien basé à Bamako confie que le Mujao tenait Gao avant l’intervention française et que pour la bataille qui a commencé le 10 février "il y en avait tout un groupe qui a pris position devant le poste de police et a commencé à tirer dans toutes les directions" (Globe and Mail, 10 février). Deux jours auparavant, le 8 février, un attentat suicide avait eu lieu à l’entrée de la même ville de Gao, du fait d’un jeune motocycliste. Et pendant les combats du 10 février, la population est restée chez elle pour éviter d’être blessée et aucune victime civile n’a été officiellement déplorée. Un poste de police a été occupé par les combattants du Mujao et le lendemain, 11 février, des hélicoptères de combats ont bombardé le poste afin de tenter de déloger les combattants.

Des journalistes qui ont observé l’assaut militaire français du poste de police ont témoigné que le bâtiment était détruit et que des cadavres sont restés au milieu des ruines. Ces affrontements qui se sont étalées sur trois jours illustrent clairement que les déclarations qui affirment que les groupes visés ont été chassés des villes de Konna, de Gao, de Sevare et de Tombouctou doivent être considérées avec scepticisme. (Al Arabiya, le 11 février )

Des porte-parole militaires français ont aussi affirmé que les groupes islamistes se sont enfuis vers la région montagneuse des Adrar des Ifoghas et des avions de combat ont bombardé les bases des combattants, ainsi que leurs lignes de ravitaillement dans la région. Mais la sécurité générale à Gao se détériore depuis plusieurs semaines et il a été rapporté que des soldats maliens ont été tués par l’explosion de mines sur la route menant vers le nord. Même la France a reconnu la présence d’unités de combattants islamistes dans des régions entre les principales villes qui attaquent au cours d’opérations mobiles. "Nous sommes dans une zone dangereuse,… nous ne pouvons être partout", a confié un officier français à des journalistes. D’autres unités de combats ont été vues à Batel, à quelque 15 kilomètres de Gao. La France continue de déployer des troupes additionnelles au Mali qui devraient se monter maintenant à 4000.

Le 8 février, dans la ville de Tessalit, des porte-parole militaires français ont déclaré avoir pris la piste d’aviation de la région. Elle servira à accueillir 1000 soldats tchadiens qui seront déployés dans les montagnes d’Adrar des Ifoghas (Globe and mail, le 11 février). Pendant ce temps, à Bamako, des affrontements avaient lieu entre des éléments rivaux au sein de l’armée malienne. Le régiment des gardes connu sous le nom de "Bérets rouges", loyal au président Amadou Toumani Toure destitué lors du coup d’Etat du 22 mars dernier, refusent d’être envoyés sur les lignes de front pour combattre aux côtés des Français. Les troupes qui ont soutenu le coup d’Etat militaire, menées par le capitaine Amadou Sanogo, officier formé au Pentagone, ont attaqué les baraquements qu’ils occupent avec les membres de leur famille. Selon les informations disponible, trois personnes ont été tuées et six autres blessées

Autre fait à relever : l’un des principaux rapports provenant du nord du Mali affirmait que l’Institut Ahmed Baba où sont conservés des milliers de manuscrits de l’ancien royaume fondé au 13ème siècle, a été incendié par les "rebelles liés à Al Qaeda" et qu’il n’en reste que de la cendre. Cette histoire mise au crédit de l’ancien maire de Tombouctou, Halle Ousmane Cisse, a suscité les passions dans le Mali, l’Afrique et dans le monde entier. Toutefois, un rapport publié par Khadija Patel révèle que cette affirmation est fausse. Selon elle, "contrairement aux rapports qui ont émergé la bibliothèque n’a pas été rasée" (Daily Maverick, le 30 janvier). Le journaliste Alex Crawford de Sky News a fait un reportage depuis l’intérieur de la bibliothèque qui apparaît relativement peu endommagée. L’institut a été financé par l’African Renaissance Fund, basé en Afrique du Sud, dans le cadre d’un effort de tout le continent pour préserver et étudier les anciennes civilisations préexistantes à l’avènement du colonialisme et de l’esclavage. Patel rapporte aussi que Vivienne Walt du Time Magazine, qui a pisté ces manuscrits au cours des 9 derniers mois, a réfuté la confusion qui les entoure. Elle déclare avoir trouvé les manuscrits en lieu sûr"

Ces développements au Mali sont indicatifs du rôle de la propagande impérialiste et de la guerre psychologique dont le but est d’obtenir le soutien du public pour des invasions militaires et des occupations. Des scénarios similaires ont eu cours concernant l’intervention en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie. Par conséquent, comme dans d’autres aventures militaires des Etats impérialistes et leurs alliés, il est nécessaire de dénoncer les mensonges qui sont répandus par l’intermédiaire des médias corporatifs. Les forces contre la guerre et contre l’impérialisme à l’intérieur de l’Afrique et dans les pays capitalistes doivent s’organiser afin de s’opposer aux interventions militaires dans tout le continent et dans d’autres parties du monde.

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** Abayomi Azikwe est le rédacteur de Pan-African News Wire. Texte traduit de l’anglais par Elisabeth Nyffenegger

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