Aide à la Somalie : L’Afrique dont nous rêvons…

Depuis Addis-Abeba, où ils étaient réunis au sommet durant les derniers jours de juillet 2011, les chefs d’Etat de l’Union Africaine ont lancé à leurs peuples un mot d’ordre de mobilisation générale en faveur des populations de la Corne de l’Afrique confrontées à une famine. Quelque 12 millions de personnes en seraient affectées. Pour Jean-Baptiste Placca, cette mobilisation africaine serait un signe de renouveau.

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N B P

Les premières images font frémir, et les pronostics des organisations humanitaires quant au nombre des morts potentiels et des handicapés à vie donnent le frisson. L’Afrique, pour une fois, a décidé de ne plus se donner en spectacle de manière aussi pitoyable. Elle veut agir !

Jusque dans les plus petits hameaux du continent, l’appel du sommet extraordinaire des chefs d’Etat est relayé. De partout, les dons affluent. Les agriculteurs offrent des céréales, de l’igname, du manioc et toutes sortes de féculents. Des paniers de légumes fraichement cueillis. Les compagnies de chemin de fer mettent à disposition des wagons entiers. Sur les routes et les pistes de tous les pays, des camions chargent ces produits à destination des plateformes portuaires et aéroportuaires, pour être acheminés vers l’Ethiopie, la Somalie, Djibouti ou l’Ouganda, en fonction des plannings communiqués par le poste de commandement de l’Union africaine, installé à son siège, dans la capitale éthiopienne.

Partout, les peuples africains donnent et se donnent pour venir en aide aux sinistrés de la famine dans la Corne de l’Afrique.

Dans les églises, les temples et les mosquées, on organise des quêtes spéciales. Les entreprises envoient des chèques ; les citoyens versent des espèces dans des lieux publics spécifiques, en grosses coupures ou, pour les plus modestes, de petites contributions. Même les enfants des écoles apportent leurs pièces. Les ministres offrent un quart de leur traitement mensuel, et les Etats eux-mêmes ajoutent leurs chèques aux fonds récoltés, et transfèrent le tout au fonds spécial dédié à la Corne de l’Afrique par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture.

Des médecins, des infirmières et même des chirurgiens dentistes se portent bénévoles pour aller donner des soins dans les camps des populations fuyant la faim. Les collégiens, les lycéens et les étudiants aident à charger les vivres dans les camions et les trains. Les personnels de la manutention, dans les ports et les aéroports, se proposent pour travailler bénévolement pour embarquer les dons dans les cargos et autres avions de transport militaire.

L’Afrique généreuse est en mouvement ! Comme elle est belle à voir !

Ceux qui en doutaient réalisent, soudain, que L’Afrique peut nourrir l’Afrique, et largement. Dans les années soixante-dix, Ebongue Soelle, percutant éditorialiste africain du Cameroun, écrivait dans la revue « Bingo » que si l’on amoncelait les restes de nourriture que jettent chaque jour les Africains, du sommet de ces gaspillages, l’on pourrait regarder avec mépris l’Himalaya. Il exagérait à peine. L’Afrique, désormais raisonnable, a décidé de traquer la famine. Et la mobilisation générale d’aujourd’hui, cette générosité insoupçonnable, sont autant de preuves que l’Afrique, définitivement, peut nourrir l’Afrique.

Dites-nous donc que nous ne rêvons pas, et que ce sommet de l’Union africaine a bien eu lieu ! Il a bien été lancé, cet appel de l’Organisation panafricaine pour une mobilisation africaine en faveur de la Corne de l’Afrique ? Ces dons, ils sont bien en route !

Ne nous dites pas que les dirigeants africains, encore une fois, sont restés là, à observer passivement les autres, venus d’ailleurs, se porter au secours des millions de sinistrés de la faim, sous leur nez !

Dites-nous que l’Union africaine ne laissera pas passer cette énième occasion de se réhabiliter aux yeux des peuples du continent, et que le continent est bien résolu à ne pas rater cet ultime rendez-vous avec sa propre rédemption ! Elle serait tellement belle à voir, cette Afrique solidaire d’elle-même !

* Jean-Baptiste Placca est journaliste, chroniqueur

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