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M K

Le Gabon connaît une crise politique continue depuis le «coup d’Etat» du clan Bongo en août et septembre 2009. C’est dans ce contexte que sont signés de nouveaux accords entre Paris et Tripoli, qui ne font que conforter la Françafrique, dénonce Mengue M’Eyaà.

Les néo-foccardiens sont en plein préparatif de l’élection présidentielle française, et pour ce faire, multiplient les contacts avec le régime illégitime. Ainsi, signale t-on la présence de l’affairiste Robert Bourgi en mission à Rome ayant eu des entretiens avec le putschiste gabonais (source : Lettre du continent) en déplacement pour un énième sommet de la FAO où les Gabonais du pouvoir n’ont d’ailleurs rien à dire, tant ils sont incompétents. Cette rencontre n’est pas fortuite et Bourgi, dont on se souvient, avec Guéant, du rôle majeur dans le putsch gabonais, n’est pas venu rencontrer leur créature gabonaise sans que cela n’ait de rapport avec la préparation de l’élection présidentielle française. Le sort de Bongo est lié à celui de Sarkozy, qui l’a nommé là où il est.

La démocratie est en recul dans toute l’Afrique francophone, en dehors de la Guinée et du Niger, négligés par Sarkozy, et le départ de Laurent Gbagbo sonne comme l’ultime règlement de compte à l’endroit d’un leader africain « indépendant » d’Afrique francophone. Il serait difficile d’assimiler Laurent Gbagbo à Sankara, mais il y a comme un sentiment de liquidation politique. Comment expliquer que la cour constitutionnelle ivoirienne soit moins légitime que celle du Gabon ? Pourquoi, les massacres perpétrés par les troupes de Ouattara sont-ils minimisés par rapport à ceux des troupes de Gbgabo ? Et les massacres de Port-Gentil, commis par les milices du régime, ville dans laquelle vivent de nombreux Français, n’ont pas donné lieu à intervention de l’armée française, qui stationne en permanence au Gabon. Aucun ordre à l’armée française n’a été donné pour procéder à l’arrestation de Bongo.

Il est clair que l’image internationale nouvelle que veut se donner Sarkozy, sur le thème des valeurs démocratiques, en s’adossant à la notoriété internationale de Barack Obama, est totalement artificielle et ne résistera pas à la campagne présidentielle approchant – même sans Dominique Strauss-Kahn.

La Françafrique évolue-t-elle dans le bon sens ? Les nouveaux accords de coopération sont parus au Journal officiel, dans un silence absolu dans un désintérêt total. Ces nouveaux accords (loi n° 2011- 425 du 20 avril 2011 autorisant la ratification du traité instituant un partenariat de défense entre la République française et la République gabonaise) présentent de prime abord un caractère volontairement technique et c’est à travers une lecture attentive qu’il est possible d’en deviner les conséquences. Ils se veulent non « interventionnistes », c’est-à dire que la France n’est plus engagée à agir militairement dans les pays avec lesquels elle est liée par les accords. L’on peut donc deviner que c’était le cas antérieurement. Mais, il y a une exception : le Gabon.

En effet, dans un article 4, le régime a supplié la France de maintenir une clause qui lui permet de bénéficier du bouclier militaire français, bien utile tant il risquerait de s’effondrer dans de brefs délais si les élections étaient menées à leur terme. Cette clause permet à la France d’intervenir s’il y a menace sur la « paix » au Gabon. Belle trouvaille ! La « paix » est vendue par le régime gabonais depuis une quarantaine d’années et permet au clan Bongo et dépendants de maintenir leur joug au Gabon.

En réalité, qui menace la paix au Gabon si ce n'est le régime lui-même en s'accrochant au pouvoir et surtout aux ressources de celui-ci ?

Ainsi, les nouveaux accords auront pour conséquence de ne rien changer au Gabon. Les élections spoliées par le parti-Etat permettront en cas de soulèvement des populations contre la dictature de faire appel à la force militaire française au motif d’une pseudo menace contre la paix, en réalité le moyen pour le régime de défendre les intérêts du clan Bongo.

Les démocrates fondent l’espoir en 2012 que le changement politique en France mettra, dans l’intérêt des populations gabonaises, un terme au bouclier militaire en faveur du clan Bongo. Il reste aussi à souhaiter que le second mandat de Barack Obama sera un peu plus ambitieux en matière de politique américaine africaine et de démocratie, une fois la France, pays allié, débarrassée des néo-foccardiens.

* Mengue M’Eyaà est présidente du Conseil exécutif du Mouvement Civique du Gabon

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