Au 19ème siècle déjà, sous le règne du Roi Ghézo (1818-1858), la femme jouait un rôle fondamental dans l’espace publique et politique. C’est avec la conquête coloniale et la destruction des systèmes et valeurs traditionnelles, qu’un nouvel ordre est venu s’installer, dans lequel les femmes se sont retrouvées réduites dans des dimensions marginales, quant à leur fonction et leur représentation. Aujourd’hui que la société béninoise vit des mutations liées à l’évolution démocratique mais aussi aux crises multiformes qui l’impactent, un ouvrage est venu éclairer les nouvelles conquêtes des femmes béninoises dans cet espace publique mouvant, ainsi que les obstacles auxquels elles font face.
«Femmes du Bénin au cœur de la dynamique du changement social », est le titre du Livre Banc de David Godonou Houina, édité récemment par la Fondation Friedrich Ebert Stiftung du Bénin. Organisé en huit sections, le livre illustre la situation de la femme béninoise qui n’a guère changé à travers le temps. La femme demeure encore faiblement représentée dans les instances et les sphères de décision.
«…Constamment flouée de ses droits, la femme est alors cantonnée dans les rôles seconds et n’émerge pas socialement à cause de la volonté de l’homme… Et pourtant la femme est l’un des puissants bras producteurs de la société béninoise. Sa présence massive, dans l’agriculture et la transformation de ses produits, ambitionne l’atteinte d’une indépendance financière pour elle », déclare le professeur Ascension Bogniaho, dans la préface du Livre blanc de David Godonou Houina : « Femmes du Bénin au cœur de la dynamique du changement social ».
L’histoire politique du Bénin mentionne la participation des femmes (les Amazones) à la vie publique et politique depuis le 19ème siècle, sous le règne du Roi Ghézo (1818-1858). Mais, cette présence des femmes dans la vie politique s'est progressivement réduite à une portion congrue depuis l’installation du système colonial par la France. David Godonou Houina, dans cet ouvrage, a adopté une approche méthodologique. Dans le chapitre « femme et droit », il ressort que le Bénin a adhéré aux Conventions, Charte et Accords régionaux et internationaux visant à reconnaître l’égalité des droits humains. Malgré cela, des discriminations faites aux femmes persistent à cause des pratiques socioculturelles en matière de santé, de propriété, d’intégrité physique et morale et de travail. Suivant la répartition par sexe des travailleurs de l’administration publique, le Bénin dispose d’une fonction publique à dominance masculine, soit 73% d’hommes contre 26,77% de femmes, affirme le chapitre « Femme et pouvoir ».
Au Conseil économique et social : 5,55% de femmes ont été membres de l’Institution de 1994 à 2009 tandis que 6,6% ont été membres du bureau. Aucune femme n’a été ni présidente de l’Assemblée nationale ni présidente de commission au Parlement béninois, de 1997 à 2007. Au gouvernement, la proportion de femme a été en moyenne de 10% et le plus fort pourcentage de femmes jamais atteint est de 23,81%. Un constat est là : des postes semblent être destinés aux femmes : ministère de la Famille ou des Affaires sociales /protection sociale, ministère de la Santé publique, ministère des Enseignements, ministère du Commerce.
Conditions de vie des femmes
Pour l’auteur de l’ouvrage, la femme béninoise est à la fois sous représentée et marginalisée dans la vie publique et sociale. Et de se demander : quelle dynamique sociale faut-il créer et quelles réformes administratives pourraient permettre de passer de la reconnaissance consacrée par la Loi à une jouissance effective ? La Béninoise est une actrice économique majeure incontournable dans l’agriculture, l’artisanat et le commerce. Cependant, elle reste confinée dans la main d’œuvre agricole et n’a pas accès à la terre au même titre que l’homme, cela, malgré le Code rural adopté en 2007.
Que ce soit en alphabétisation ou dans les ordres d’enseignement, l’ouvrage fait remarquer que ce sont les femmes et les filles qui comptabilisent les pires performances : elles sont les moins scolarisées, ont le plus faible taux de promotion, même si en terme d’égalité numérique l’équilibre tente de s’établir. Ainsi tout n’est pas que sombre en matière de contrôle citoyen de l’action publique, le dynamisme féminin dans les centrales syndicales n’est plus à démontrer, ainsi qu’en matière de lobbying, de plaidoyer dans les réseaux d’organisation non gouvernementale et d’association.
«Quoi de plus étonnant si les femmes polarisent la préoccupation majeure de la Nation ? Est-ce de l’air du temps, ou la vogue, est-ce de la vogue, est-ce du paternalisme que d’accorder une attention particulière à la couche la plus nombreuse d’une population ? Cet engagement, me semble-t-il, est obligatoire et salutaire si on veut faire participer toutes les composantes du peuple, surtout la plus industrieuse aux tâches de développement», affirme encore le professeur Ascension Bogniaho
* Marie-Louise F. Bidias Matchoudo est directrice de Publication de Mayro Magazine"
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