Le 28 septembre 1958, la Guinée vote «Non» à l’occasion du référendum sur le projet de Constitution proposé par le général Charles de Gaulle, pour l’établissement d’une Communauté franco-africaine. Elle est ainsi le seul territoire, parmi les colonies françaises d’Afrique, à prendre le chemin de l’Indépendance. Celle-ci sera prononcée le 2 octobre 1958. Cet acte de souveraineté internationale dont on fête le 50e anniversaire, avait été d’abord posé le 25 août 1958, dans un discours prononcé par Ahmed Sékou Touré, futur président de la Guinée indépendante. Une phrase restée dans la postérité en résume l’esprit : «Il n’y a pas de dignité sans liberté : nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage». A quoi de Gaulle avait répondu : «L’indépendance est à la disposition de la Guinée [mais] la France en tirera les conséquences’’.
Sékou Touré était alors président du Conseil du gouvernement et député-maire de Conakry. Il recevait le chef de l’Etat français dans le cadre d’une tournée dans les Territoires d’Outre-Mer pour faire la promotion de son projet de Constitution visant la création d’une Communauté franco-africaine. Le «Non» de la Guinée à cette union se traduira de manière écrasante lors du référendum du 28 septembre, avec 1 million 136 324 voix contre 56 981, sur un total de 1 millions 203 875 votants pour 1 million 408 500 inscrits.
La Guinée proclame ainsi son indépendance le 2 octobre 1958. Un an après le Ghana de Kwame Nkrumah, cet acte de rupture exalte les progressistes sur le continent africain et au sein de la diaspora. Ils sont nombreux à affluer en Guinée pour aider le jeune État sur la voie de la construction de son développement et l’affirmation de sa dignité.
Comme un symbole, le «Non» de la Guinée avait été prononcé 60 ans jour pour jour après l’arrestation, par les Français, de l’Almamy Samory Touré (1830-1900), un des plus grands résistants africains à la pénétration coloniale et dont Sékou Touré se présentait comme un descendant.
Devant une France devenue hostile alors qu’elle lui tendait la main dans l’indépendance et l’égalité, Sékou Touré assume le nouveau destin de son pays. Le 4 novembre 1958, un mois après la souveraineté internationale acquise, il déclare : «Le paysan noir n’avait rien à perdre sinon une partie de la misère et de soin humiliation en accédant à l’indépendance (…) Le choix de la Guinée est donc un choix africain et il a traduit les aspirations profondes de nos populations. L’Afrique a vécu sur l’apport de la France. Elle demande à vivre avec l’apport de la France, mais si cet apport lui est refusé, elle saura vivre sans cet apport dans la dignité».
Le premier président de la Guinée est mort le 26 mars 1984, alors qu’il était au pouvoir. Ayant dirigé son pays d’une main de fer, il n’a pas su faire de ce qu’il appelait un «scandale géologique», du fait de son extraordinaire richesse minière et naturelle, un «miracle du développement». Pas plus que ses héritiers au pouvoir. La Guinée est encore aujourd’hui un des pays les plus en retard dans l’Indice de développement du PNUD.
Mais cinquante ans plus tard, le discours du 25 août de Sékou Touré ne brille pas seulement pour son symbole. Il continue d’interpeller un continent sur la voie de la dignité et de la liberté. Pambazuka News vous le propose.
* Tidiane Kassé est rédacteur en chef de l’édition française de Pambauka News
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