Déclaration d'intellectuels et chercheurs sur la destruction des manuscrits de Tombouctou

La destruction des manuscrits de Tombouctou s’inscrit dans la longue histoire de destruction des bibliothèques dont le continent africain n’a pas l’exclusivité. Elle est la manifestation d’un désir d’effacement d’une mémoire intellectuelle et culturelle. Cette destruction est aussi l’effet d’une géopolitique où l’Afrique est au cœur de nouveaux pillages, de nouvelles prédations, et de nouvelles guerres.

Nous, intellectuels africains et de la diaspora et leurs collègues venant d’Asie, des Amériques et d’Europe réunis à Dakar dans le cadre du Symposium « La bibliothèque coloniale en débat » protestons avec force contre la destruction, le saccage et l’incendie de manuscrits anciens abrités par l’institut Ahmed Baba dans la ville de Tombouctou.

Venant s’ajouter à la perte de nombreuses vies humaines et aux innombrables brutalités qui ont accompagné le conflit au Mali, cet acte consacre la destruction de ressources intellectuelles sans prix, accumulées au cours des âges et conservées à travers les générations. Il est une grave blessure à la mémoire, à l’esprit, et à l’être africain et à celui de l’humanité toute entière.

Cet acte s’inscrit dans la longue histoire de destruction des bibliothèques dont le continent africain n’a pas l’exclusivité. Il est la manifestation d’un désir systématique d’effacement d’une mémoire intellectuelle et culturelle qui avait débuté dans le nord du Mali avec la destruction de mausolées et de sites historiques. Cette destruction est aussi l’effet d’une géopolitique où l’Afrique est au cœur de nouveaux pillages, de nouvelles prédations, et de nouvelles guerres.

Nous condamnons cet acte et pleurons cette perte. Alors que nous discutons de la « bibliothèque coloniale » et de la « bibliothèque africaine », la destruction de ces manuscrits nous rappelle à quel point la préservation et la transmission du savoir est une priorité et un droit, et toute atteinte contre ce droit un crime.

Nous exigeons des gouvernements africains non plus des promesses mais des actions concrètes et urgentes dédiées à la sauvegarde des bibliothèques, des manuscrits et autres créations de l’esprit avant qu’il ne soit trop tard et qu’il ne leur reste que des lamentations trop souvent hypocrites. La guerre cible d’abord les peuples mais elle est aussi toujours et partout une menace pour les livres, les bibliothèques, et la culture.

Au nom des participants

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** Dr. Ebrima Sall est secrétaire exécutif du Codesria ; Prof. Mamadou Diawara est Directeur Point Sud

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