Dans ce texte présenté lors de la première conférence à la mémoire de Mwalimu Nyerere, le 14 octobre 2005 à l’Université du Cap (Afrique du Sud), Haroub Othman se souvient des jours glorieux de l’«Ecole de Dar es Salaam », l’impact énorme qu’elle a eue sur la libération de l’Afrique et le rôle de Mwalimu Nyerere qui lui a donnée une forme distincte des modèles coloniaux et occidentaux. Haroub se rappelle aussi comment, lors de sa dernière visite, Mwalimu a insisté sur un point important, qui est que « l’Afrique au sud du Sahara était seule » et que «nous devons compter sur nous-même et collaborer entre nous». Prenant note de cet esprit panafricain, Haroub nous rappelle que le sous-continent australo-africain doit faire face à une crise profonde et lance un appel pressant «à son intelligentsia afin qu’elle transforme nos sociétés et donne un contenu à la dignité humaine.
D’abord je voudrais remercier les associations estudiantines de l’Afrique de l’Est et de l’Université du Cap en général, d’avoir organisé la commémoration de la mort de Mwalimu Julius Nyerere et de m’avoir invité à donner cette conférence sur quelqu’un que je respecte et admire beaucoup. Au cours de ma vie, j’ai rencontré beaucoup de dirigeants africains dont je mentionnerais que quelques uns. Et afin de n’offenser personne, je ne mentionnerai que les défunts : Kwame Nkrumah du Ghana, Ahmed Sékou Touré de Guinée, Ferhat Abbas d’Algérie, Augustino Neto d’Angola, Samora Machel du Mozambique, Amilcar Cabral de Guinée Bissau et du Cap Vert et Oginga Odinga du Kenya.
J’ai aussi rencontré plusieurs dirigeants sud africains, y compris des personnalités historiques comme Olivier Tambo, Yusuf Dadoo, Walter Sisulu, Govan Mbeki, Alfred Nzo, Duma Nokwe et Joe Slovo. Mais Mwalimu Nyerere n’était pas juste un dirigeant : c’était un homme d’Etat. J’ai délibérément évité de le désigner sous l’appellation de politicien parce que les politiciens vont et viennent. Les hommes d’Etat perdurent et l’empreinte de leur présence sur la société est perçue pendant de nombreuses années après leur mort. Si je puis me permettre de répéter après Shakespeare, le bien qu’ils font leur survit.
J’ai toujours trouvé les propos de Mwalimu Nyerere très articulés et lui-même excellent dans sa capacité d’expliquer en termes simples des problèmes complexes. En plus de sa capacité de se mettre au diapason de son audience.
Beaucoup de définitions ont été tentées pour dire ce qu’est un intellectuel. Est-ce quelqu’un qui a fréquenté l’université ou, comme le suggère Ali Mazrui, «quelqu’un qui est stimulé par une idée et a acquis la capacité de manier certaines de ces idées de façon efficaces ? Est-ce un professionnel ou quelqu’un qui peut discourir sur Picasso, Tolstoï ou Beethoven ? Byron estimait qu’un intellectuel n’était pas seulement une personne attirée par des idées, mais quelqu’un dont le but dans la vie, ses pensées et ses actions sont déterminées par ces idées. Issa Shivji avance qu’un des attributs importants de l’intellectuel «est sa capacité de rire de soi-même’’. Je considère qu’un intellectuel est non seulement une personne capable d’analyser le présent, mais qui sait aussi articuler des idées qui ont un impact durable sur ceux qui les reçoivent. Quelle que soit la définition qu’on adopte, le fait important est que le rôle d’un intellectuel dans n’importe quelque société est colossal.
L’éducation occidentale en Afrique, en particulier en Afrique australe, est un phénomène récent. Les sociétés africaines précoloniales n’avaient pas - à quelques exceptions près, de système d’éducation formel. Mais si le but de l’éducation, comme le formule Julius Nyerere, « est de transmettre d’une génération à l’autre la sagesse et le savoir accumulés d’une société et de préparer les jeunes gens à devenir les membres de cette société et à assurer leur participation future au maintien et au développement de cette société, alors ces sociétés avaient des systèmes d’éducation adéquat. Le but de l’éducation occidentale, qui arrivée avec la colonisation, était d’instiller dans l’esprit des récipiendaires, la notion de la supériorité de leurs maîtres coloniaux et d’en faire une idole. D’abord, c’était les fils des chefs et d’autres dirigeants traditionnels qui ont reçus cette éducation ; plus tard, avec l’expansion de l’économie coloniale, de plus en plus de gens l’ont acquises. Budo, Kisubi, Fort Hare, Makerere, ont tous été crées dans ce but. L’objectif était de produire des employés, des enseignants, des prêtres, des ouvriers agricoles, des assistants pour les hôpitaux et d’autres afin de contribuer au fonctionnement de la machinerie coloniale.
La formation universitaire n’était réservée qu’à quelques uns. Ce n’est qu’après l’indépendance que la formation est devenue plus largement accessible. Des quelques uns qui ont reçu une éducation occidentale, tous ne se sont pas comportés selon les attentes du régime colonial. Certains sont devenus des opposants véhéments du système colonial, non seulement dans la sphère politique et économique, mais aussi dans le domaine de l’éducation, de la culture et autres. Les raisons sont évidentes.
Le colonialisme a affecté aussi bien les chefs traditionnels que le travailleur ordinaire. Il n’a pas même permis l’émergence d’un capitalisme autochtone. Alors que dans les possessions coloniales en Asie et semi coloniales de la Chine, il a été permis à une classe sociale locale d’agents de voir le jour, cette classe n’a pas émergé dans la majeure de l’Afrique. Il n’est donc pas surprenant que dans la plupart des Etats africains, les messagers des mouvements nationalistes aient été des gens de la bureaucratie coloniale.
Les pays de l’Afrique australe ne sont pas un groupe homogène. Il y a des différences culturelles, historiques et d’expérience. Mêmes des pays qui ont eu les mêmes maîtres coloniaux comme le Zimbabwe et la Tanzanie ou l’Angola et le Mozambique, sont différents dans leurs compositions sociales et leur niveau de développement économique. Parmi eux, il y a des pays qui ont atteint l’indépendance selon des voies paisibles, comme la Tanzanie et le Swaziland, et d’autres comme le Mozambique, l’Angola ou le Zimbabwe qui l’ont conquise par la force des armes.
En raison des conditions spécifiques de ces pays de la région, chacun a cheminé sur le chemin vers l’indépendance différemment. Et chacun de ces pays a porté à la tête des mouvements d’indépendance, un groupe d’individus qui, quelque soit la définition, peuvent être désignés sous le terme d’intellectuels. Ce que tous avaient en commun étaient le fait que ces groupes comprenaient des gens avec le plus haut engagement à l’égard de l’idéal de l’indépendance et de dévouement pour parvenir à leur but.
Les origines de cette intelligentsia très active au plan politique sont variées. Dans le cas de la Tanzanie continentale, dont l’économie reposait principalement sur la paysannerie et où l’éducation était essentiellement l’affaire des écoles des missions chrétiennes, le produit du système ne dépassait guère la collectivité paysanne. Ceci était différent en Afrique du Sud où une large section de la communauté a été arrachée à ses terres, où une importante classe ouvrière s’est formée et où une organisation politique indépendante de cette classe existait. La conséquence logique d’une telle tendance serait de produire des intellectuels qui, pour citer Amilcar Cabral, saurait où finit la lutte pour l’indépendance nationale et où commence la lutte pour l’émancipation sociale.
Une des réussites du système colonial dans la région est d’avoir été capable de produire une académie dépendante de la production intellectuelle occidentale. Cette intelligentsia comprenait ce qui se passait dans d’autres sociétés, mais ne connaissait pas grand chose de sa propre société. C’est la situation qui a prévalu pendant très longtemps dans les universités africaines. Il est vrai qu’il se trouvait quelques individus qui allaient à l’encontre du modèle général, mais le modèle des universités étaient des répliques de leurs pairs européens. Comme l’a déclaré Mwalimu Nyerere, « nos universités se sont efforcées de comprendre la société occidentale et ont aspiré à être comprises par elles, postulant apparemment que par ce moyen elles préparaient leurs étudiants – et elles-mêmes, à être au service de la société africaine.» L’université de Dar es Salaam a été la première à s’éloigner de ce modèle.
Commencée en 1961 comme collège constitutif de l’université de l’Afrique de l’Est (elle-même au bénéfice d’un statut de coopération avec l’université de Londres), le collège de l’université de Dar es Salaam est devenue une université de plein droit en 1970 après qu’une décision commune aient été prise par les trois Etats de l’Afrique de l’Est de créer chacun sa propre université nationale. L’université de Dar es Salaam, dans son programme et son agenda de recherche, s’est efforcée de s’éloigner des paradigmes décidés par d’autres. Elle s’est efforcée d’inculquer un sens du devoir à l’égard de la société comme elle s’est efforcée de faire accepter les valeurs en adéquation avec la société post-coloniale. Il y a eu un effort délibéré de lutter contre l’arrogance intellectuelle jugée déplacée dans une société de citoyens égaux.
L’université de Dar es Salaam a aussi joué un rôle dans le développement intellectuel de la région. Au cours de la décennie 1967/1977, elle a été un véritable chaudron bouillonnant d’idées et a fourni une tribune magnifique pour débats et discussions. Aucun érudit africain ou combattant de la liberté ne pouvait ignorer ses abords. Cependant que le gouvernement y amenait ses invités officiels pour y admirer le pittoresque extérieur, style Mont Olympus, d’autres sont venus y chercher le savoir ou pour raffiner leur position idéologique. C’est là que les Allemands de l’Est et les Allemands de l’Ouest, qui officiellement ne se parlaient pas, les Chinois et les Américains qui officiellement ne se supportaient pas, les Bancs et les Noirs d’Afrique du Sud qui, chez eux, ne pouvaient même pas s’asseoir ensemble dans la même église, c’est là donc, dans des salles de conférences construites par les Suédois et les Anglais, qu’ils débattaient non seulement du cheminement de la Tanzanie vers le développement, mais aussi de la guerre du VietNam, de la question palestinienne, de l’Apartheid, de la Révolution Culturelle chinoise et d’innombrables autres sujets. Ces débats ont été intenses et nombreux les discours et les écrits qui en sont issus.
Cette atmosphère existait en partie en raison des conditions crées par la Déclaration d’Arusha, le document politique sur le socialisme et l’autonomie et en partie due à l’esprit libéral de Mwalimu Julius Nyerere qui était le « Visiteur » du collège universitaire et qui est devenu le premier chancelier lorsque l’université de Dar es Salaam a été instituée. Mais on ne doit pas sous-estimer l’impact que la présence des mouvements de libération a eu sur le développement intellectuel de la Tanzanie. Ces mouvements n’étaient pas seulement engagés dans la lutte pour la libération de leur pays respectifs, mais ses cadres dirigeants devaient en permanence, suite à ces luttes, raffiner leurs théories et hypothèses ; ils ont trouvé que le campus universitaire leur fournissait un excellent terrain d’exercice où mettre leur théories à
l‘épreuve.
Ainsi donc, au cours de ce processus, les mouvements de libération ont non seulement amené leurs personnages dominants, mais également les dissidents et les messagers des conflits futurs. Du FRELIMO du Mozambique sont venu des personnages comme le tribaliste religieux, le révérend Urio Simango, le nationaliste libéral Dr Eduardo Mondlane et le poète marxiste Marcelino dos Santos. De l’ANC d’Afrique du Sud, on a eu des personnes comme Duma Nokwe, Joe Jele et Ambrose Makiwane ; le PAC a amené Lebalo et Gora Ebrahim ; et le MPLA d’Angola a amené Agostinho Neto et les futurs éléments de Nito Alves. Le parti communiste d’Afrique du Sud a amené ses géants comme Yusuf Dadoo, Moses Mabhida et Joe Slovo. Comme je suis au Cap, je devrais mentionner que le Mouvement pour l’Unité a aussi envoyé ses gens au campus de Dar es Salaam. Des déclarations parmi les plus significatives de ces mouvements se sont faites à University Hill, y compris la fameuse déclaration de Neto en 1974, avant l’indépendance de l’Angola, sur le thème de «Qui est l’ennemi ? ». Un document qui est resté, jusqu’à aujourd’hui, le document le plus substantiel de la MPLA.
Parfois, les maisons du personnel ont été transformées en salles de conférence et en lieu d’interaction sociale. Il y a même eu des jours où elles ont été utilisées comme cachette, certains dirigeants de ces mouvements de libérations ne souhaitant pas faire connaître leur présence dans le pays. Je me souviens du temps où Yusuf Dadoo et Joe Slovo (et si ma mémoire ne me fait pas défaut, Thabo Mbeki, le président d’Afrique du Sud), venaient à l’université pour y ‘’réfléchir’’.
La presse tanzanienne de l’époque a offert une tribune très utile pour débattre et discuter. Benjamin Mkapa, l’actuel président de la Tanzanie, était alors le rédacteur en chef du ‘’The Nationalist» (le journal du parti au pouvoir) et le journal du gouvernement était sous la direction du Dr Frene Ginwala (l’ancien président du Parlement sud-africain) qui en était aussi le rédacteur exécutif, cependant que Mwalimu Nyerere en était le rédacteur en chef. Hormis des informations, ces journaux ont aussi publié des articles de grande qualité et ont ouvert leurs pages à de sérieux débats sur des affaires internes et internationales.
Des gens provenant du monde entier sont venus enseigner à Dar es Salaam. Ils sont venus pour différentes raisons. Il y avait ceux qui avaient besoin d’une expérience africaine, mais dans un environnement apaisant leur conscience ; il y a eu ceux qui étaient stimulés par le potentiel révolutionnaire du pays et, étant des internationalistes, avaient le sentiment de devoir faire une contribution ; d’autres encore avaient besoin d’une pause dans leur propre lutte et d’un espace et de temps pour réfléchir. C’était certainement l’université la plus internationale qui se puisse trouver dans un pays du Tiers Monde. Certaines des personnes qui sont venues sortaient directement de l’école et leur venue à Dar es Salaam constituait leur «baptême ». D’autres étaient des académiques chevronnés, de renommée internationale.
Il est facile de se souvenir des Sud Africains comme Ruth First, Archie Mafeje, Denis Brutus, Willy Kogkositle, Harold Wolpe, Bob Leshoai, Sixghashe, Dan O’Meara. Linzi Namicom et Tshabalala de l’Afrique de l’Est et de l’Afrique australe sont venus, ainsi que Nathan Shamuryarira qui plus tard est devenu Premier Ministre du Zimbabwe. Ibbo Mandaza Miti et Frank Mbengo sont venus aussi du Zimbabwe. Ortin Chirwa, le premier ministre de la justice du Malawi ainsi que son épouse, Vera (actuellement membre de la Commission africaine des Droits de l’Homme et des Peuples) et Mutharika, le frère de l’actuel président du Malawi, son passés par là. On peut aussi citer Tunguru Huaraka de Namibie (qui est bien connu dans cette université), Yash Tandon et Dan Nabudere d’Ouganda, tout comme Yash Ghai du Kenya.
Mais les gens sont aussi venus de loin comme l’historien guyanais et militant politique Walter Rodney ; l’économiste hongrois Tamás Szentes ; Okidigo Nnoli des sciences politiques nigérianes et Claude Ake ; les Ghanéens Aki Sawyer et Emanuel Hansen ; les historiens britanniques Terence Ranger et John Illife, Lionel Cliffe des sciences politiques et les économistes John Loxley et Peter Lawrence ; les Canadiens Cranford Pratt, qui a été le premier principal du collège universitaire et John Saul ; et tant d’autres venant du Danemark, des Etats-Unis et d’autres rivages encore. Lorsque, en 1985, j’était dans ce qui était alors la République Démocratique Allemande, pour une conférence sur les études africaines, j’ai découvert que beaucoup de leurs spécialistes de l’Afrique avaient été à Dar es Salaam.
Nombreux sont ceux qui comme Boutros Ghali, professeur d’université avant de devenir ministre en Egypte pour, enfin occuper le poste de Secrétaire Général des Nations Unies (le premier Africain à occuper un tel poste) et Adebayo Adedeji, l’ancien secrétaire exécutif de la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique, ont inclus une étape à University Hill dans leur programme à chaque fois qu’ils se trouvaient à Dar es Salaam. Yoweri Museweni, quelques mois avant qu’il ne marche sur Kampala, s’est rendu sur le campus pour voir quelques vieux amis ; et lors de sa première visite en Tanzanie en sa qualité de chef d’Etat, il a donné une conférence publique à l’université. Les héros Rivonia, après leur libération de Robben Island, en route pour la Suède où ils devaient rencontrer Oliver Tambo, sont passés par Dar es Salaam et se sont rendus à l’université pour parler avec la communauté.
De nombreux académiciens sont devenus célèbres grâce au travail intellectuel qu’ils ont produit à Dar es Salaam. Le livre légendaire de Walter Rodney, How Europe underdevelopped Africa, celui de Clive Thomas concernant les questions de transition et le classique de Tamás Szentes, The Political economy of underdevelopment, ont tous été écrits à Dar es Salaam. L’université n’a pas seulement été un havre pour des érudits radicaux et les militants, les étudiants eux-mêmes ont trouvé l’expérience productive et stimulante. Issa Shivji, alors qu’il était étudiant, avait déjà produit « Tanzania : the silent class struggle ».
Yoweri Museweni, Kapote Mwakasungura, qui plus tard est devenu le Haut Commissaire au Zimbabwe, Sali Msoma, l’actuel Secrétaire principal au ministère tanzanien des Transports et des Communications et Andrew Shija, qui a rejoint l’armée tanzanienne dès qu’il fût diplômé, ont quitté la salle de classe pour rejoindre les cadres du FRELIMO dans les zones libérées du Mozambique encore sous domination portugaise. Le Canadien Paul Saul, des sciences politiques, alors qu’il enseignait à Dar es Salaam, a fait la même chose. Le journal estudiantin « Cheche » (L’étincelle) devenu « Maji Maji », était très recherché et les professeurs étaient en compétition les uns avec les autres pour avoir leurs articles publiés dans le journal.
Dès sa conception en 1961, sous forme de collège universitaire, jusqu’à en 1985 lorsqu’il a démissionné, Mwalimu Nyerere a joué un rôle important dans la formation de l’université et a pris un intérêt personnel particulier dans son développement. Je ne pense pas qu’il y ait eu une institution nationale qu’il ait visitée aussi souvent que l’université.
Mwalimu est né le 13 avril 1922, dans le petit village Butiama, au sein d’une minorité ethnique de Tanzanie. Il a grandi dans un environnement africain typique et plus tard dans sa vie il est devenu l’incarnation de la lutte africaine pour la liberté et l’indépendance nationale et le symbole des aspirations de la population pour l’émancipation sociale et la plénitude humaine. Il avait 12 ans lorsqu’il a commencé à aller à l’école et c’est seulement après avoir atteint sa majorité qu’il a embrassé le christianisme. De l’école de Tabora, haut lieu de l’éducation dans le Tanganyika d’alors, il est ensuite allé au Makerere College en Ouganda, afin d’y acquérir un diplôme en éducation. Makerere, à cette époque, était le sommet des institutions de formation en Afrique de l’Est et a représenté une étape importante pour Mwalimu Nyerere, dans la mesure où c’est là qu’il a formulé les objectifs et principes qui devaient le guider plus tard dans la vie. Après avoir quitté Makerere, il a fait la déclaration suivante :
« Pendant que j’étais à Makerere, j’ai compris que mon gouvernement dépensait quelque 80£ annuellement pour moi. Mais ceci ne signifiait pas grand-chose pour moi ; après tout, 80£ ne représente qu’une minuscule fraction de la totalité des sommes qui sont récoltées auprès des contribuables africains. Mais aujourd’hui, ces 80 £ ont crû et signifient beaucoup pour moi. Ce n’est pas seulement un cadeau précieux, mais c’est aussi une dette que je ne peux jamais rembourser. »
« Je me demande si quelqu’un d’entre nous a jamais compris que pendant que l’on dépensait 80£ pour moi (et pour tant d’autres étudiants à Makerere par le passé et au jour d’aujourd’hui) que des dispensaires de villages n’étaient pas construits ni dans mon village ni dans d’autres villages. Il y a des gens qui sont peut-être morts faute de médicaments parce que 80£ étaient dépensées pour moi, un simple individu, alors que cet argent aurait pu être dépensé pour la construction d’un bon dispensaire. A cause de ma présence dans ce collège - et je n’ai rien fait pour mériter Makerere - tant d’Aggreys et de Booker Washington sont restés analphabets, faute d’écoles où ils auraient pu aller, parce que l’argent pour la construction de l’école a été investie dans Nyerere, un étudiant plutôt sot et irresponsable à Makerere. Ma présence au collège a donc privé la communauté des services de ceux qui auraient pu être formés dans ces écoles et qui auraient pu devenir Aggreys ou Booker Washington. Comment puis-je repayer ma dette à la communauté ? La communauté dépense tout cet argent pour nous parce qu’elle veut que nous devenions des leviers et donc, nous devons rester en dessous et soutenir le poids des masses qui doivent être élevées et nous devons faciliter cette élévation. »
Après Makerere, il a brièvement enseigné avant que d’entreprendre les études menant à un Master en histoire à l’université d’Edinburgh en Ecosse. Il était le premier Africain du Tanganyika à obtenir des qualifications outremer. Et c’était à Edinburgh que ses idées politiques se sont cristallisées.
Après son retour au Tanganyika, il a enseigné quelque temps dans une école missionnaire chrétienne avant que de se lancer à corps perdu dans la lutte nationaliste pour l’indépendance. La Tanganyika African Association (TAA), fondée en 1929 par des commerçants et des fonctionnaires de la région urbaine, était avant tout une organisation caritative. C’est seulement en 1954 qu’elle a été transformée en une organisation politique connue sous le nom de Tanganyika African National Union (TANU), dont Nyerere est devenu le président.
Comme je l’ai déjà dit, Julius Nyerere a dominé la scène politique et intellectuelle de la Tanzanie pendant presque cinq décennies et même maintenant, après sa mort, son influence se fait toujours sentir. Je veux essayer ici, brièvement de considérer quelques-unes de ses idées.
Dans son « Ujamaa, la base du socialisme africain », Mwalimu Nyerere a rejeté l’idée que les divisions de classe existaient dans les sociétés de l’Afrique précoloniale, affirmant, au contraire, que ces sociétés vivaient tranquillement et en paix et n’ont fait l’expérience d’aucun antagonisme. Il avait le sentiment qu’il était possible pour les Africains de se rassembler, peut importe leurs origines, afin de créer un mouvement national dont l’unité perdurerait après l’indépendance. Il n’a pas seulement rejeté la notion de l’existence de classe sociale avant la colonisation mais encore il n’a pas vu son évolution pendant la période coloniale.
En 1967, la Tanzanie déclare son intention de construire le socialisme sur la base de l’autonomie. Julius Nyerere était certainement le pouvoir intellectuel derrière la Déclaration. En fait, Jeanette Hartmann a déclaré que Nyerere l’avait écrite lui-même et qu’elle a reconnu son écriture dans le document. La Déclaration a suscité un immense intérêt. Pour les socio-démocrates européens, elle annonçait la possibilité de la réalisation de leurs idéaux dans un cadre africain. Par contre, les puissances impérialistes craignaient que l’exemple de la Tanzanie se répande dans le reste de l’Afrique. A partir de 1967, les actions de la Tanzanie, au niveau national et dans l’arène internationale étaient jugées selon les termes de la Déclaration d’Arusha. Sa relation rapprochée de la Chine ou son acceptation de l’aide des pays socialistes de l’Europe de l’Est étaient vues comme une tendance de la Tanzanie à s’intégrer davantage encore dans l’orbite socialiste. Mais comme le répétait Julius Nyerere, la Déclaration d’Arusha devait être vue comme une déclaration d’intention. La Tanzanie n’a été un état socialiste ni en 1967 ni en 1985, lorsque Nyerere a quitté la présidence.
La Déclaration n’était pas sans défaut et sa réalisation a été loin d’être un succès. Il y a eu des raisons à cela. Mais comme plan de développement, c’était quelque chose d’unique en Afrique. C’était positif et cela a donné de grands espoirs à des millions de Tanzaniens. Dans un autre document – « Socialism : the rational choice »- Mwalimu a argumenté que pour un pays comme la Tanzanie, le socialisme était le seul choix possible, parce que même si elle voulait construire une société capitaliste, cette option leur est fermée. Ce que Mwalimu Nyerere a réussi, c’est de mettre le socialisme dans l’agenda national. On ne peut donc être d’accord avec Ali Mazrui, et de nombreux autres, qui disent que le socialisme était une ‘’faillite héroïque’’. Le Wall Street Journal avait déclaré :
« Il a fusionné les 120 tribus de Tanzanie en un Etat dont la cohésion a prévenu les conflits tribaux qui ont affligés une bonne partie de l’Afrique… Par-dessus tout, il a prouvé qu’il est possible de forger une nation où les vicissitudes des affiliations ethniques sont bannies de la vie sociale et politique. Il a créé et promu une lingua franca puissante, le Swahili, qui a unie et formée les gens’’
Il a prêché la tolérance raciale et religieuse. Suite au départ de Mwalimu Nyerere, le pays s’est effondré dans les bras du FMI et de la Banque Mondiale. Lorsqu’il a quitté le pouvoir, le revenu per capita était de US$280. En 1998, treize ans après son départ, c’était US$140 et l’inscription à l’école a chuté de 63%. Certaines de ses réalisations progressives ont été érodées, mais il entrera certainement dans l’histoire comme la personne qui a augmenté les perspectives d’un développement socialiste en Tanzanie.
La contribution de la Tanzanie dans la libération de l’Afrique est bien connue. Presque tous les mouvements de libération africains ont bénéficié de la protection de la Tanzanie. Le Comité de Libération de l’OUA avait son quartier général à Dar es Salaam, dès l’établissement de l’OUA en 1963. On ne peut séparer Julius Nyerere de la position de la Tanzanie. Il faut se souvenir que, dès 1960, alors que le Tanganyika n’était pas même indépendant, Nyerere a publié un pamphlet intitulé Barriers to Democracy, dans lequel il fustigeait les communautés blanches du Kenya, de Rhodésie et d’Afrique du Sud parce qu’elles rejetaient le concept d’une société multiraciale sous l’autorité de la majorité noire. Aussi, en 1961, juste avant l’indépendance du Tanganyika, dans un article sans équivoque adressé au journal londonien « The Observer », Nyerere a déclaré, à l’intention du gouvernement britannique, que la participation du Tanganyika indépendant au Commonwealth dépendrait de l’Afrique du Sud qui devait soit abandonner la politique de l’Apartheid ou se retirer du Commonwealth. L’Afrique du Sud et son Apartheid se sont retirés du Commonwealth.
Comme nous l’avons dit précédemment, il n’y a pas un seul mouvement de libération africain qui n’ait eu le bénéfice du soutien de la Tanzanie. Le FRELIMO a été fondé en Tanzanie, l’ANC, après avoir été banni de l’Afrique du Sud, a ouvert sa première mission extérieure en Tanzanie ; et le MOLINACO, le MPLA, la ZANU, le PAC et bien d’autres, ont eu l’entier soutien de la Tanzanie. Dans le comité de décolonisation des Nations Unies (connu sous le nom de Comité des 24), dont le représentant permanent de la Tanzanie auprès des Nations Unies, Salim Ahmed Salim, a assumé la présidence pendant plusieurs années, et dans le Mouvement des Non Alignés, la Tanzanie a toujours été à l’avant-garde pour mobiliser du soutien en faveur des luttes pour la libération.
Le soutien de la Tanzanie aux mouvements de libération n’était pas seulement manifeste dans les arènes politiques et diplomatiques, mais aussi sur le terrain matériel et militaire. La population tanzanienne a été mobilisée plus d’une fois pour donner un soutien matériel aux mouvements de libération. Les Forces de Défense du Peuple Tanzanien a formé des milliers de cadres militaires des mouvements de libération qui requéraient ce type de soutien. La Tanzanie a servi de dépôt ou a transporté différents équipements pour les mouvements de libération. C’est un fait connu que les forces portugaises ont bombardé des villages frontaliers au cours de la lutte du FRELIMO pour l’indépendance. Tout ceci témoigne de la position ferme de la Tanzanie dans la question de la libération de l’Afrique. Mais une fois de plus, c’était Julius Nyerere qui a été capable de, non seulement donner une position intellectuelle à cette question, mais également de l’articuler effectivement.
Julius Nyerere a toujours été non raciste dans ses points de vue et ceci l’a occasionnellement mis en conflit avec des membres du parti au pouvoir et le gouvernement. Durant la lutte pour l’indépendance du Tanganyika, il a rejeté les points de vue des africanistes au sein de la TANU qui avaient pour slogan «l’Afrique aux Africains », c'est-à-dire les Africains noirs. En 1958, à Tabora, lors de la conférence nationale de la TANU, lorsque certains dirigeants se sont fortement opposés à la participation de la TANU aux élections tripartites proposée par les colonialistes et où les électeurs devaient voter trois listes (celle des Africains, celle des Asiatiques et celle des Européens), Julius Nyerere a endossé la proposition et a recommandé son acceptation. Ceci a amené les africanistes à quitter la TANU et à former le African National Congress. C’est extrêmement inquiétant que ce monstre du racisme soit entrain de réapparaître sur la scène tanzanienne. Certains politiciens, au cours de la campagne électorale et dans leur quête du pouvoir, usent de la carte raciste comme cela s’est manifesté lors du congrès du parti au pouvoir en mai dernier . Il est très regrettable qu’aucune mesure sévère ne soit prise pour contrer cette tendance, donnant ainsi l’impression que les dirigeants du pays l’approuvent.
De nouveau après l’indépendance, lorsqu’une section de la TANU et des mouvements syndicalistes, le Tanganyika Federation of Labour, ont exigé l’africanisation de l’administration, Julius Nyerere a lui parlé de ‘’tanganyikanisation’’, donnant ainsi un contenu non raciste à toute l’idée. Son engagement en faveur de la libération de l’Afrique découle de ses convictions antiracistes, mais aussi de la croyance qu’il est faux et diabolique pour une puissance étrangère de coloniser un autre peuple comme c’est également faux qu’une minorité raciale subjugue une majorité raciale. Mwalimu Nyerere n’a jamais douté que les Blancs du Zimbabwe ou d’Afrique du Sud avaient les mêmes droits que leurs compatriotes noirs.
Julius Nyerere croyait aux moyens pacifiques pour atteindre certains objectifs politiques. Il s’est efforcé, au cours de la lutte pour l’indépendance du Tanganyika, de diriger le mouvement de l’indépendance vers des méthodes pacifiques. Mais dans l’ambiance fiévreuse de l’époque, les militants de la TANU ou du TFL appelaient à la confrontation et Nyerere a continué d’appeler à la retenue. Lorsque, après avoir été condamné pour calomnies, il a eu le choix entre aller en prison ou payer une amende, il a choisi l’amende, pas tant pour éviter d’être un prisonnier politique, mais bien parce qu’il craignait qu’en son absence les choses tournent mal et que la violence ne fasse irruption.
Néanmoins, lorsque tous les moyens pacifiques étaient épuisés, Mwalimu Nyerere n’a jamais hésité à plaider pour l’usage de la violence contre un régime opprimant. Quelques mois avant que la Grande Bretagne ne remette le pouvoir au Sultan du Zanzibar, il a fait appel au gouvernement britannique par l’intermédiaire du Secrétaire colonial, leur demandant de reconsidérer leurs intentions, parce qu’il avait le sentiment qu’à moins que la situation ne soit rectifiée pour permettre une transmission pacifique du pouvoir à la majorité, alors la violence serait inévitable. Et la suite lui a donné raison, puisque 4 semaines après l’indépendance, le régime du Sultan a été violement renversé par des partis d’opposition. Et encore, lorsque les nationaliste d’Angola, de Guinée Bissau, du Mozambique et de ce qui était alors la Rhodésie du Sud et d’Afrique du Sud ont été contraints de prendre les armes contre les régimes coloniaux et de l’Apartheid, Mwalimu Nyerere a engagé des ressources tanzaniennes et son prestige personnel en aidant ces mouvements de libération à s’engager dans la lutte armée, et n’y voyait pas de contradiction avec ses convictions non violentes.
La dernière visite de Mwalimu Nyerere à l’université de Dar es Salaam a eu lieu en décembre 1997, lorsqu’il est venu participer à une conférence internationale sur le thème de «La réflexion sur les dirigeants en Afrique- 40 ans après l’indépendance ». La conférence était en l’honneur de l’anniversaire de ses 75 ans et avait été organisée conjointement entre l’Institute of Development Studies de l’Université de Dar es Salaam et la Fondation Mwalimu Nyerere. Le Nkrumah Hall de l’université, qui a une capacité de 500 à 600 places, débordait de monde. Les organisateurs n’attendaient pas plus de 100 personnes. Des ministres, des dirigeants de partis politiques, des académiques, des étudiants (quand bien même c’était les vacances de Noël), des militants deS ONG, des diplomates étrangers et les média, ils étaient tous là. C’était évident que le centre d’attraction était Mwalimu Nyerere et que tous étaient venus le voir et l’écouter.
Après le discours d’introduction délivré par le vice-président de la Tanzanie, feu Dr Omar Ali Juma, la parole a été donnée à Mwalimu Nyerere. Il a parlé pendant plus d’une heure et demie, entièrement « ex tempore ». C’était un de ses meilleurs discours et malheureusement, le dernier à l’université. L’audience l’a adoré. Ce discours je l’ai reproduit intégralement dans le livre que j’ai publié, contenant les documents de la conférence, intitulé : Leadership in Africa - 40 years after indépendance et qui a été publiée en 2000 par VUB University Press, à Bruxelles en Belgique.
Dans ce discours, Mwalimu a souligné une question très importante, à savoir que l’Afrique au sud du Sahara est seule. L’Amérique du Nord, c'est-à-dire les Etats-Unis et le Canada doivent prendre des mesures pour aider le Mexique sinon les migrants latino continueraient d’aller vers le nord, même si il y a un mur d’acier. Les Slaves, Croates, Tchèques et d’autres ressortissants d’Europe de l’Est sont attirés par l’Europe occidentale et les Nord Africains sont intéressés par l’Europe du sud. Les gens du Sud Est asiatique se tourneront vers le Japon. Mais les Africains du Sud du Sahara n’ont pas « d’oncle» vers qui se tourner. Nous sommes tout seul. Nous devons dépendre de nous-même et coopérer entre nous.
Après la cérémonie d’ouverture, il y a eu des ateliers. Dans l’atelier auquel il participait, Mwalimu était très actif, parlant avec sa lucidité coutumière, élaborant, illustrant. Dans une session, l’audience était pensive, le regardant échanger des vues avec Issa Shivji sur la question de la terre ; dans un autre, il explique pourquoi il a été contraint de demander à un groupe de combattants pour la liberté de quitter le pays, une question soulevée par un document présenté par un chercheur russe sur les affaires africaines, Vladimir Shubin. A la fin d’une des sessions, Mwalimu a invité l’intellectuel sud africain, Patrick Bond à le suivre dans sa résidence de Msasani afin de poursuivre la discussion. Bond avait soulevé la question de la capitale afrikaner et de son comportement dans la région de l’Afrique australe.
Le dernier travail intellectuel de Mwalimu Nyerere a été la traduction en Kiswahili, de la « République» de Platon. Dans son lit d’hôpital au St Thomas Hospital à Londres, il a revu le manuscrit, fait les corrections requises et l’a terminé avant de mourir. Malheureusement l’ouvrage n’a pas encore été publié.
Mwalimu Nyerere n’était pas un saint (bien, que selon les média, des discussions soient en cours parmi les catholiques de sa région natale, demandant à l’Eglise de commencer le processus de béatification) et il a commis un certain nombres d’erreurs. Mais son patriotisme était sans faille, son engagement et son dévouement à la cause de l’Afrique au-dessus de tout soupçon et son intégrité hors du commun. Ses réalisations ont été nombreuses et les dirigeants en Tanzanie (et en Afrique), présents et futurs, seront jugés à l’aune instaurée par des gens comme Mwalimu Julius Nyerere.
Actuellement le sous continent de l’Afrique australe est face à une crise profonde : les héritages du colonialisme et de la domination blanche, le sous développement et le problème de la dette, le VIH/SIDA et les calamités naturelles et celles de la main de l’homme. Tout ceci pose un défi sérieux à l’intelligentsia de la région. Les intellectuels du passé colonial auraient pu être attirés par l’attirail colonial, mais ils ont préféré se joindre aux mouvements d’indépendance. L’intelligentsia actuelle n’a rien qui les attire dans l’Etat post-colonial. Notre rôle est de transformer la société et de donner un contenu à la dignité humaine. On devrait vivre de telle sorte que sur son lit de mort on puisse dire : j’ai donné toute ma force pour la libération de l’humanité.
REFERENCES
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Lerumo A (1971). Fifty Fighting Years – The South African Communist Party 1921- 1971. London: Inkululeko Publication.
Mamdani, M. (1986). Our Political Role Today: Problems and Prospects, UDASA Newsletter/Forum.
Mandaza, I. (1988). The Relationship of Third World Intellectuals and Progressive Western Scholars: An African Critique. SAPES No. 5 February.
Miliband and Panitch (eds). (1990). The Retreat of Intellectuals. The Socialist Register.
Nyerere, J. K.
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- (1986). The Political Legacy of Julius Nyerere, SOAS, London.
- (1992). The Intellectual and Transformation in Southern Africa. University of Western Cape.
- (2000). Reflections on Leadership in Africa: Forty Years After Independence, VUB University Press, Brussels.
Shivji, I. G. (1986). Intellectual in Crisis and the Crisis of Intellectual, UDASA Newsletter/Forum.
* Feu le professeur Haroub Othman enseignait les études du développement à l’université de Dar es Salaam - Cette conférence a été reproduite ici avec la permission des ayant droits et sera publié dans le livre de Ohtman, à paraître prochainement.
Cet article constituera un chapitre dans le livre à paraître ‘Nyerere’s legacy’, textes rassemblés par Chambi Chachage et Annar Cassam et publié par Pambazuka Press Books
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